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Éviter le "y'a un truc"


Dorian CAUDAL

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Il y a 1 heure, Alx a dit :

Mais en close-up, le spectateur a explicitement le droit de participer (c'est même ce qu'on attend de lui : pensez à une carte, prêtez-moi votre bague, gardez cette balle dans votre main...). Il fait partie du spectacle, dans une relation d'égal à égal, et par conséquent, peut avoir le sentiment d'une certaine légitimité : les conventions ne sont pas les mêmes qu'au théâtre.

Le close-up à une relation étroite entre l'interprète, le spectateur et l'acte magique.

Cela peut donner au spectateur une sensation de liberté, et c'est bien.

Mais je crois que cette liberté ne devrait être qu'ilusoire.

C'est d'ailleurs une des difficultés du close-up :

Laisser croire au spectateur qu'il jouis d'une liberté, alors que le magicien reste toujours parfaitement maître du déroulement du spectacle.

Quand Peter parle "d'autorisation" d'agir donnée au spectateur, pour moi, cela recouvre plusieurs aspects.

Le contexte.

C'est au magicien de poser les limites de l'intervention du public.

Le public en général, ne deviens pénible que si on ne lui a pas indiqué son rôle. Et c'est à l'interprète de le faire, parfois explicitement (voir toutes les répliques classiques pour maîtriser une interaction qui dérive...)

Le personnage.

Le personnage peut être une personne plus ou moins "contestable", c'est à dire qu'on peut mettre en doute ce qu'il dit.

Cela d'ailleurs n'a pas à voir avec le type de personnage, à mon sens, mais avec la force du personnage.

Un personnage peut être sympathique ou intimidant, s'il est "fort", s'il a de la présence, il ne sera pas contesté.

Le rythme.

On peut jouer sur le rythme, pour laisser la parole, ou pas, aux spectateurs. Si on soupçonne une intervention pouvant être nocive au numéro, on peut anticiper en changeant le rythme.

L'adresse.

En s'adressant à un spectateur plutôt qu'a un autre, on lui passe carrément la parole. Et on va mettre au second plan un autre spectateur plus dissipé.

La syntaxe.

Quand on laisse la parole à un spectateur, on peut orienter le type de réponse que l'on attend grâce à la syntaxe de notre passage de parole (réponse ouverte, fermée, rhétorique, donnant lieu à une réplique rigolote...)

Le rebond.

Un spectateur s'exprime alors qu'on ne le souhaitais pas : on va rebondir sur ce qu'il exprime, pour reprendre la parole. Ainsi, le spectateur se sent écouté, puisqu'on répond à son interruption, mais on redirige l'action vers ce qui nous intéresse.  C'est parfois plus efficace que d'ignorer l'interrupteur...

Par exemple, et pour revenir à la question précise du titre :

"Y'a un truc"

Bien sûr, il y a un truc! D'ailleurs, je vais vous montrer... (Rebond)

Et on s'embarque alors dans un tour de fausse explication (qui n'a pas besoin d'avoir un rapport avec le tour précédant... "Je vais vous monter sous un autre angle..."), avec un rythme ne permettant pas d'autres interruption avant un temps significatif (rythme+durée).

On y fera intervenir une autre personne (adresse), et on reviendra à la fin vers celui qui a fait l'interruption, pour lui demander s'il a mieux compris (syntaxe, et rebond sur la réponse avec une réplique rigolote)

A l'inverse, on peut se servir de ce "y'a un truc" comme dynamiseur d'attention :

"Un truc? Non, pas besoin... Tenez, cette fois, je ne touche à rien, regardez..."

et on part sur un tour sans manip apparente...

On aura toute l'attention désirée.

Attention toutefois a ne pas transformer celà en défi.

Pour cela, on peut par exemple miser sur le ton (on ne veux pas convaincre, on donne juste une précision, on n'a rien à cacher...)

La désinvolture est une bonne méthode...

On peut aussi entrer dans la pédagogie :

"Un truc? Pourquoi faire? Ce que vous ne savez pas, c'est que la magie que vous croyez voir dans mes mains, elle n'existe que dans votre esprit... Et pour manipuler votre esprit, je ne me sert pas de "trucs", c'est un peu plus subtil que ça..."

Etc.

A tous ces niveau, il y a deux choses importantes :

La préparation.

Il faut être préparé, avoir imaginé à l'avance les réactions, y avoir trouvé des remèdes réfléchis (les premiers qui nous passent par l'esprit ne sont pas les seuls possibles, et ne sont pas forcément les plus efficaces..)

Même si on n'est jamais prêt pour tout ce qui tournera mal, se préparer n'est pas du temps perdu.

L'écoute.

Durant la prestation, il faut être présent et attentif.

Mentalement présent, je veux dire.

On n'est pas dans notre tour, notre texte, notre manip... Ces choses là devraient couler sans notre intervention (ou en tout cas, sans que celà n'absorbe notre conscience)

Être attentif à ce qui se passe avec les spectateurs, c'est essentiel (et pas qu'en close-up...), cela permet d'anticiper, de réagir, de s'adapter.

Et participe au rendu pour le public :

On voit tout de suite quand un artiste est "avec nous", ou en train de penser à autre chose...

Une autre composante, c'est l'expérience.

Que Peter ou d'autres magiciens n'aient pas de problème, ce n'est pas étonnant : ils maîtrisent le métier, et tout est mis en œuvre pour que ca se passe bien, sans que le spectateur ne se rende compte de tous le travail en amont...

Bon, l'expérience, c'est aussi quand on a une situation qui nous a échappé, et qu'on se donne les moyens à postériori pour que ca ne se reproduise pas.

C'est le métier qui rentre... 🤯😉

Gilbus

 

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Quand le magicien montre la lune avec son doigt, le public regarde le doigt...

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il y a 9 minutes, Antony RBLLR a dit :

Je pense que c'est également une question d'éducation et de respect.

Tu as tout à fait raison!

J'ai assisté à un spectacle (chants et danse, par des pros) sur l'ile de Jersey, et tous les Français de l'assistance avaient été stupéfaits  de l'attitude du public locale (ce n'était pas un spectacle"pour touristes"...) : les gens discutaient dans la salle, des enfants couraient partout, et peu de monde en fait, faisait attention au spectacle...

Il y à des contextes ou des cultures qui peuvent nous surprendre ou nous choquer...

Gilbus

Quand le magicien montre la lune avec son doigt, le public regarde le doigt...

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Il y a 1 heure, Gilbus a dit :

Le close-up à une relation étroite entre l'interprète, le spectateur et l'acte magique.

Cela peut donner au spectateur une sensation de liberté, et c'est bien.

Mais je crois que cette liberté ne devrait être qu'ilusoire.

C'est d'ailleurs une des difficultés du close-up :

Laisser croire au spectateur qu'il jouis d'une liberté, alors que le magicien reste toujours parfaitement maître du déroulement du spectacle.

Quand Peter parle "d'autorisation" d'agir donnée au spectateur, pour moi, cela recouvre plusieurs aspects.

Je suis tout à fait d'accord, et je te remercie pour cette liste synthétique des trucs qui permettent de garder la main pendant une représentation en close-up  (en fait, les vrais trucs des magiciens ne sont pas ceux que les spectateurs imaginent 😉) .

Note bien que la plupart des gens, s'ils ont un minimum d'éducation et/ou s'ils n'en sont pas à leur quatrième verre, ne vont pas interrompre le tour : ma remarque concernait surtout les réactions après coup.

Mais ton intervention va bien dans le même sens que la mienne : la simple existence de ces astuces démontre bien que la situation existe. En close-up, le spectateur n'hésite pas à intervenir, sans malveillance, mais parce qu'il se sent partie prenante de l'expérience.

C'est pourquoi Peter a raison de dire que son approche et la mienne sont différentes : je persiste à penser (à tort, peut-être) que le contexte étant différent, le public l'est aussi. Ca viendra sans doute avec les années (ou avec le talent, comme disait Sarah Bernhardt)

L'important, c'est que ça valide !

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Oui, c'est à cette anecdote que je faisais allusion : Sarah Bernhardt a souffert du trac toute sa vie. Un jour, avant une représentation, une jeune actrice s'en est étonnée et lui a dit "C'est curieux, moi, je n'ai jamais le trac". Et elle lui aurait répondu : "Ne vous inquiétez pas, mon petit, ça viendra avec le talent"

Pardon pour cette parenthèse historico-culturelle, vous pouvez reprendre le débat 🙂

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L'important, c'est que ça valide !

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  • 6 months plus tard...
  • 2 months plus tard...
Le 13/08/2020 à 04:08, Peter DIN a dit :

En ce qui me concerne, lorsqu’un spectateur me dit « bravo, je n’ai rien compris », je pense instantanément : « Tiens aujourd’hui, j’ai travaillé comme un sabot ! ». Car si j’avais été bon, le spectateur n’aurait même pas eu l’idée de comprendre ou d’essayer de le faire, je l’aurai embarqué dans mon univers.

C'est exactement la même attitude que celle du grand magicien allemand, Punx.

Propriétaire de I Saw That! Exclusive Magic, éditeur de RencontresSub Rosa, Reading Writing, Card Stories, Performing Magic for Children et autres livres de qualité.

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Il y a à mon sens  2 pistes pour éviter cette remarque :

 

-          Soit tu deviens un comédien qui fait de la magie. Tu crée un personnage, une ambiance, un thème. Il devient alors évident que la pièce que tu joues est plus importante que la technicité de ta magie.

Un bon exemple est Eric Antoine. Après un de ses sketches, j'imagine mal que le "il y a un truc" soit prononcé par quelqu'un...

Mais c’est très difficile. Il faut savoir être comédien, écrire ses pièces…

 

-          Soit éviter de se prendre, même sans le savoir, trop au sérieux. Beaucoup de magiciens peuvent donner l’impression d’affirmer être de véritables magiciens, d’affirmer que la carte a véritablement changé de couleur, qu’ils peuvent réellement réparer une corde coupée, qu'ils sont capables de faire des choses que le spectateur, lui, ne peut pas faire. Cela peut même devenir une démonstration de dextérité exceptionnelle.

Or, ce genre d’attitude (volontaire ou involontaire) peut créer une forme de défiance du public.

A mon sens, il vaut mieux dire que « nous sommes là pour jouer ensemble à créer des illusions ».

Et si on te dit  « il y a un truc… », répondre « Bien sûr que oui 😊 si non, ce serait trop facile ! ».

Ou « Bien sûr, je suis membre du syndicat des marchands de rêves. Je vends du rêve éveillé ! ».

 

Je crois que très souvent le problème est lié au fait que, même inconsciemment, nous nous comportons comme si nous affirmions avoir de véritables pouvoirs, même si ce n’est pas ce que nous voulons faire croire au public !

Je pense (avis personnelle) que cela provient du profil des magiciens. A mon sens, souvent, les gens qui pratiquent de la magie sont fondamentalement animés par le désir d’impressionner plutôt que de produire une œuvre artistique comme peuvent le faire les comédiens, les chanteurs, etc.

Raison pour laquelle on voit souvent des questions du style « que faire si je n’ai pas mon jeu truqué et qu’on me demande de faire un tour qui le nécessite ? » « que faire si on me demande de recommencer un tour que je ne peux pas recommencer ? », et même « que faire si on me demande un tour que je ne sais pas faire ? ».

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Une autre réflexion : je pense de plus en plus que la magie, comme les autres arts, n'est fondamentalement pas faite pour être produite en famille ou auprès d'amis.

D'abord, ce sont des conditions informelles produisant des comportements très informels que n'aurait pas un public d'étrangers.

Ensuite, il est difficile de changer de personnalité (au niveau langage verbal et non verbal) en présence de la famille et d'amis.

Or, la très grande majorité d'entre-nous ne faisons des tours qu'à nos proches. Il est alors difficile de produire une œuvre artistique et de ne pas être qu'un simple démonstrateurs de tours suscitant des réflexions comme "il y a un truc !"

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