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Et voici quelques vidéos de @Otto WESSELY que j'ai assemblé pour lui 

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Publié le
Le 21/07/2025 à 23:36, Thomas a dit :

Voici un extrait de la FISM :

Reglement FISM.jpeg

Le règlement est très vague et de ce fait, on peut arguer que la simple disparition d'un FP dans un foulard aurait compté.

Comment la FISM définit-elle un « trick » ?  Et un « act » ? Est-ce qu’un tour comportant des répétitions d’un même effet sous des conditions de plus en plus restrictives par exemple peut suffire à bâtir un « act » ? Sait-on si les participants reçoivent en plus du règlement disponible sur le site de la FSIM des directives plus détaillées ?

***

Si j’ai bonne mémoire (possiblement défaillante vu l’avalanche de magie dévorée pendant 6 jours) l’italien Piero VENESIA n’a présenté qu’un seul tour (l’effet où des aiguilles et autres objets avalés par le magicien-fakir sont régurgités enfilés sur un fil) ce qui ne l’a pourtant pas empêché de tirer son épingle du jeu avec le 2e Prix en magie de salon.

***

Description du numéro pour qui veut :

À l’entame de ce numéro muet, le petit disque lumineux d’une poursuite perce le noir de scène pour révéler progressivement Piero VENESIA tiré à quatre épingles, pieds serrés, une main derrière le dos. Comme le disque de lumière va s’agrandissant, il révèle à sa droite une de ces anciennes machines à coudre, de celle qu’avait ma grand-mère, encastrée dans une petite table en bois aux pieds ornementés en fer, avec une courroie de cuir qui relie le mécanisme d’entrainement de l’aiguille à un large pédalier métallique situé sous la table.

Nous sommes donc dans une maison de couture.

S’agit-il d’un client ? Non : et la posture semblable à celle d’un valet au garde-à-vous tout prêt à exécuter une courbette, et la douzaine d’aiguilles qui accrochent bien la lumière piquées dans le revers de tissu sombre de sa veste, lèvent l’ambiguïté : Piero VENESIA est le petit tailleur.

Une première aiguille avalée pour ainsi dire accidentellement, et Piero qui ne s’en trouve pas plus mal, se pique d’avaler toutes les autres. Un instant on a pu craindre que chaque nouvelle aiguille avalée allait être l’objet d’une pantomime propre, question de « meubler » le numéro (comme on l’a vu dans d’autres « acts » avec des textes trop longs et parfois superflus ou -surtout en magie scène- avec des jongleries et autres pas de danse quelque peu « plaqués » entre deux effets proprement magiques). Mais non, Piero VENESIA accélère le mouvement pour avaler toutes ses aiguilles (avoir toutes les aiguilles préalablement piquées dans ses revers participe de la clarté de l’effet) ; et de là, il amorce son crescendo, à la fois en variant taille et nature des objets avalés, mais aussi en accentuant le côté « tour de force »  des conditions dans lesquelles ces objets sont ingérés.

Ainsi plutôt que d’avaler une à une des aiguilles, un petit faisceau de celles-ci sera placé dans un verre, mêlé à du vin, et le tout sera avalé d’un trait. Et, tant qu’à faire, pourquoi ne pas avaler au passage le bouchon de liège du carafon de vin. Repu, Piero s’allume une cigarette de fin de repas qu’il gobe avec son allumette. Restait la question du fil, blanc, bien visible depuis le début du numéro sur la machine à coudre : Piero s’en saisit, le rompt, et le convertit en fil dentaire d’après repas, avant de le manger aussi.

S’ensuit la classique régurgitation un à un de tous les objets que le magicien retire dramatiquement de sa bouche.

***

Autant qu’on puisse en juger Piero VENESIA emploie ici un « décalage temporel » (D.ORTIZ) : c’est-à-dire que la révélation de l’état final débute (avec les premières aiguilles qui apparaissent sur le fil extrait de la bouche -> relâchement du spectateur , la magie a opéré, plus la peine de chercher le "truc") alors que la méthode pour produire l’effet n’est pas terminée. Malheureusement pour Piero VENESIA vendredi dernier le jury l’a sans doute épinglé à cet instant précis, faute à un mouvement curieusement chorégraphié qui attire trop l’attention sur lui et ne fournit pas la couverture suffisante à la dernière manœuvre nécessaire pour le final.

Je viens de réaliser qu’une version de ce numéro était en ligne et ce moment clef y fait d’ailleurs l’objet d’un plan de coupe opportun :

 

Rien de plus suspect pour un magicien que de dérober à la vue des spectateurs ses mains, qu’elles farfouillent trop longuement dans ses poches, sous la table ou dans son dos. Piero VENESIA offre ici une intéressante solution à deux niveaux :

·         Par sa pose initiale, celle d’un groom au garde-à-vous, d’un valet de pied, Piero VENESIA fixe l’image d’une posture archétypale, et si plus tard il l’adopte à nouveau, une main derrière son dos, cela nous parait tout naturel.

·          De plus placer une main derrière son dos est ici davantage perçu comme signe de franchise - pour exposer à la vue de tous le plus possible l’objet avalé ou régurgité.

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Cordialement,

Dominique

 

Publié le
Le 25/07/2025 à 11:29, Dominique BODIN a dit :

Comment la FISM définit-elle un « trick » ?  Et un « act » ? Est-ce qu’un tour comportant des répétitions d’un même effet sous des conditions de plus en plus restrictives par exemple peut suffire à bâtir un « act » ? Sait-on si les participants reçoivent en plus du règlement disponible sur le site de la FSIM des directives plus détaillées ?

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Si j’ai bonne mémoire (possiblement défaillante vu l’avalanche de magie dévorée pendant 6 jours) l’italien Piero VENESIA n’a présenté qu’un seul tour (l’effet où des aiguilles et autres objets avalés par le magicien-fakir sont régurgités enfilés sur un fil) ce qui ne l’a pourtant pas empêché de tirer son épingle du jeu avec le 2e Prix en magie de salon.

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Description du numéro pour qui veut :

À l’entame de ce numéro muet, le petit disque lumineux d’une poursuite perce le noir de scène pour révéler progressivement Piero VENESIA tiré à quatre épingles, pieds serrés, une main derrière le dos. Comme le disque de lumière va s’agrandissant, il révèle à sa droite une de ces anciennes machines à coudre, de celle qu’avait ma grand-mère, encastrée dans une petite table en bois aux pieds ornementés en fer, avec une courroie de cuir qui relie le mécanisme d’entrainement de l’aiguille à un large pédalier métallique situé sous la table.

Nous sommes donc dans une maison de couture.

S’agit-il d’un client ? Non : et la posture semblable à celle d’un valet au garde-à-vous tout prêt à exécuter une courbette, et la douzaine d’aiguilles qui accrochent bien la lumière piquées dans le revers de tissu sombre de sa veste, lèvent l’ambiguïté : Piero VENESIA est le petit tailleur.

Une première aiguille avalée pour ainsi dire accidentellement, et Piero qui ne s’en trouve pas plus mal, se pique d’avaler toutes les autres. Un instant on a pu craindre que chaque nouvelle aiguille avalée allait être l’objet d’une pantomime propre, question de « meubler » le numéro (comme on l’a vu dans d’autres « acts » avec des textes trop longs et parfois superflus ou -surtout en magie scène- avec des jongleries et autres pas de danse quelque peu « plaqués » entre deux effets proprement magiques). Mais non, Piero VENESIA accélère le mouvement pour avaler toutes ses aiguilles (avoir toutes les aiguilles préalablement piquées dans ses revers participe de la clarté de l’effet) ; et de là, il amorce son crescendo, à la fois en variant taille et nature des objets avalés, mais aussi en accentuant le côté « tour de force »  des conditions dans lesquelles ces objets sont ingérés.

Ainsi plutôt que d’avaler une à une des aiguilles, un petit faisceau de celles-ci sera placé dans un verre, mêlé à du vin, et le tout sera avalé d’un trait. Et, tant qu’à faire, pourquoi ne pas avaler au passage le bouchon de liège du carafon de vin. Repu, Piero s’allume une cigarette de fin de repas qu’il gobe avec son allumette. Restait la question du fil, blanc, bien visible depuis le début du numéro sur la machine à coudre : Piero s’en saisit, le rompt, et le convertit en fil dentaire d’après repas, avant de le manger aussi.

S’ensuit la classique régurgitation un à un de tous les objets que le magicien retire dramatiquement de sa bouche.

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Autant qu’on puisse en juger Piero VENESIA emploie ici un « décalage temporel » (D.ORTIZ) : c’est-à-dire que la révélation de l’état final débute (avec les premières aiguilles qui apparaissent sur le fil extrait de la bouche -> relâchement du spectateur , la magie a opéré, plus la peine de chercher le "truc") alors que la méthode pour produire l’effet n’est pas terminée. Malheureusement pour Piero VENESIA vendredi dernier le jury l’a sans doute épinglé à cet instant précis, faute à un mouvement curieusement chorégraphié qui attire trop l’attention sur lui et ne fournit pas la couverture suffisante à la dernière manœuvre nécessaire pour le final.

Je viens de réaliser qu’une version de ce numéro était en ligne et ce moment clef y fait d’ailleurs l’objet d’un plan de coupe opportun :

 

Rien de plus suspect pour un magicien que de dérober à la vue des spectateurs ses mains, qu’elles farfouillent trop longuement dans ses poches, sous la table ou dans son dos. Piero VENESIA offre ici une intéressante solution à deux niveaux :

·         Par sa pose initiale, celle d’un groom au garde-à-vous, d’un valet de pied, Piero VENESIA fixe l’image d’une posture archétypale, et si plus tard il l’adopte à nouveau, une main derrière son dos, cela nous parait tout naturel.

·          De plus placer une main derrière son dos est ici davantage perçu comme signe de franchise - pour exposer à la vue de tous le plus possible l’objet avalé ou régurgité.

Wow. Ce numéro est extraordinaire. 

C'est beau, la simplicité. 

Merci pour tes avis et compte-rendus, que je trouve très justes et avisés. Ça fait plaisir à lire.

Publié le
Le 25/07/2025 à 11:29, Dominique BODIN a dit :

Je viens de réaliser qu’une version de ce numéro était en ligne et ce moment clef y fait d’ailleurs l’objet d’un plan de coupe opportun :

 

 

Magnifique !! 

Merci pour ce partage ! 

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Publié le (modifié)
Le 21/07/2025 à 22:53, Dominique BODIN a dit :

 

***

Ces six jours furent intenses, passionants, et totalement épuisants : épuisants par ces montagnes russes émotionnelles quand on passe d'un numéro où du fond de son siège on se sent en total empathie avec l'artiste, on croiserait presque les doigts pour que le numéro tienne jusqu'au bout, on vibre et on craint, puis l'instant d’après on aimerait se terrer sous son siège tant le numéro proposé tourne à la débandade complète, le numéro s'étire, la confusion embrume les esprits, les applaudissements s'étiolent, la gêne s'installe.

 

 

@Dominique BODIN écrit bien et il souligne le coté psychologique des participants. @Dominique BODIN m'a promis de faire un CR complet de cette Fism 2025, @Thomas m'a promis de lui réserver 150 Go d'espace.... Ce sera le seul CR qui sera complet et qui va faire l'histoire. Courage et merci d'avance ! otto

Donc : au travail !!

Modifié par Otto WESSELY
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www.ottowessely.fr

Publié le

Merci Otto pour ton compte-rendu très agréable à lire, tout en légèreté. J'en déduis que Voronin est quelqu'un de simple et de très sympa en plus d'être un grand artiste. Avec Finn Jon et Oguz Engin, il fait partie des quelques magiciens que j'aimerai rencontrer depuis que je suis gamin mais pour lesquels l'occasion ne s'est pas encore présentée.

Par contre j'ai du mal avec la vodka mais mon père fait un très bon ratafia, ça fera l'affaire pour trinquer avec lui et les copains le jour venu.

 

  • Merci 1

L'illusionnisme est l'art de donner une réalité à des choses impossibles ou très peu probables.

Publié le

Bonjour,

Heureux si j'ai pu partager avec certains quelques unes des émotions ressenties pendant les six jours de cette FISM. À propos d'émotions, le numéro du 1er prix en magie de salon en débordait.

(précision : lors de son second passage sur "Fool Us" le tout début de ce numéro a déjà été montré : si vous ne l'avez pas déjà vu...alors tant mieux, gardez-vous de le regarder, vous vous gâcheriez une partie du plaisir de la version intégrale)

***

Asi WIND dans « Incredibly Human » ou Derren BROWN dans son dernier livre se posent la même question : pour que dans un spectacle vivant et interactif une émotion sincère puisse naître, il faut que surgisse une connexion authentique entre l’artiste et son public. Dès lors, comment concilier en magie cette authenticité de la relation humaine avec un art qui est, lui, tout entier tourné vers l’artifice ?

Ce jeudi 17 juillet à TURIN au matin, lors de la compétition de magie de salon, Mortenn CHRISTIANSEN a à sa manière si particulière fait surgir cette bouffée d’humanité dans un auditorium comble.

***

Dès le départ tout est allé de travers pour le candidat danois Mortenn CHRISTIANSEN, appelé sur scène alors qu’il n’était absolument pas prêt. Mais alors pas prêt du tout, du tout, du tout.

Le jeune homme bien portant boulottait des chips en douce dans les coulisses au moment d’entrer en scène, mais dans la précipitation, c’est la cata : sa main droite s’est coincée dans son tube de chips. Son désarroi est palpable. Pour tenter de sauver la mise de demander malgré tout une carte à un spectateur (Shawn FARQUHAR s’y colle, va pour le 4 de cœur) avant de s’apercevoir que son paquet de cartes est coincé dans la poche arrière droite de son pantalon -pas de bol, pile du côté de sa main bloquée dans le paquet de chips : au prix de moult contorsions Mortenn parvient à faire remonter peu à peu le paquet de cartes qui émerge de sa poche et finit par chuter sur scène. Il le ramasse de sa seule main libre -la gauche- sort les cartes et enchaine une série de piètres manipulations d’une main. Les maladresses succèdent aux maladresses, Mortenn peste, marmonne combien il n’était pas prêt, laisse lamentablement choir toujours plus de cartes, bref sa prestation tourne à l’embarras complet.

Mais attendez, voilà que Mortenn ne tient plus qu’une seule carte, dos au public…se pourrait-il ?

***

À cet instant la routine bascule : Mortenn fanfaronne : « Eh eh…vous avez cru que je n’étais pas prêt…et bien c’était pour de faux, j’étais prêt, archi-prêt… ». Qu’on se le tienne pour dit, on va voir ce qu’on va voir.

Non pas bien sûr que quiconque dans la salle ait réellement cru à la farce de Mortenn pas prêt – même si cette séquence du pauvre garçon en prise aux pires coups du sort aura quand même suffit à susciter notre empathie immédiate envers lui-, mais nous voilà, nous dans la salle, passés en un clin d’œil de spectateurs à spect-acteurs, projetés dans le rôle qui nous est assigné : celui d’adultes face à un petit enfant trop content d’avoir roulé son monde dans la farine ; et nous allons, pour lui faire plaisir, faire comme si nous avions effectivement gobé la bonne blague de sa déroute feinte. Par sa personnalité scénique et sa mise en scène, ayé, le (vrai) tour est joué : le bras de fer potentiel public-magicien est illico désamorcé, nous consentons à entrer dans le monde de Mortenn, nous jouons à faire comme si nous avions vraiment cru qu’il était pris de court, et ainsi nous nous livrons pieds et poings liés au garnement.

Mortenn est un enfant mais pas à la manière mettons d’un Rubi FEREZ- enfant lunaire, rayonnant et malicieux, qui s’émerveille de tout. Non, pour Mortenn le monde est vaste et compliqué ; puéril et hypersensible (donc hyper-attachant) il est en butte aux gens et aux choses qui le rendent bien, bien, malheureux. Et la magie est son salut.

Et la vraie magie est que tout le reste de la routine va puiser sa justification précisément dans le personnage même de Mortenn CHRISTIANSEN, dans sa « revanche » face aux grandes personnes.

***

Car à cet instant la routine bascule aussi en termes de nature d’effet magique : on va passer d’une démonstration burlesque d’habilité à retrouver une carte par des manipulations faussement maladroites, à un tout autre effet : une prédiction. Ou plutôt des prédictions.

Les magiciens ont sans doute tendance à surestimer l’impact réel des effets de prédiction sur leur public, et, pour donner un semblant de construction dramatique à leur numéro, à multiplier les révélations sur le mode : « vous avez librement choisi le 4 de cœur…observez miracle ! C’est la seule carte à dos rouge dans ce paquet bleu… non seulement cela, mais j’ai aussi un 4 de cœur tatoué sur mon bras…et attendez un peu…une carte et une seule dans mon portefeuille le 4 de cœur… ». Le kicker jusqu’à plus soif. La surenchère de prédictions au lieu de décupler l’effet bien souvent l’amoindrit. On avait saisi le message dès la première prédiction révélée : ok le magicien a prévu l’avenir, quel besoin a-t-il donc de nous le « prouver » encore et encore ? L’insistance superflue éveille la suspicion : lors d’un spectacle vu il y a quelques temps j’entendis ainsi soupirer un spectateur au moment de la « trop parfaite » énième révélation : « Bon ok donc c’est le 4 de cœur tous les soirs... » (sic) (pages 46-47 de « Notes from a Fellow Traveler » D.BROWN explique la réécriture du final de son show « Enigma » suite à un exemple semblable d’accumulations d’effets redondants qui s’affaiblissaient mutuellement au lieu de créer la montée dramatique escomptée).

Mortenn CHRISTIANSEN va réemployer cette structure « discutable » et lui aussi multiplier les prédictions de la carte choisie -au moins 5 de mémoire : alors pourquoi ici cela fonctionne-t-il si bien, jusqu’à déclencher une standing ovation ?

Premièrement le choix initial est on ne peut plus convaincant, transparent : le spectateur nomme librement la première carte qui lui passe par la tête -le jeu n’est même pas encore sorti, et puis quelles manipulations possibles avec une main fourrée dans un paquet de chips ? Comme notre esprit rationnel est tranquillisé de ce côté-ci par une procédure rapide et limpide, il va se faire d’autant plus facilement submerger ensuite par notre esprit émotionnel.

Car, deuxièmement, l’accumulation de révélations de prédictions de cette carte est motivée dramatiquement (et donc notre esprit rationnel le cède d’autant plus aisément à notre esprit émotionnel) : c’est juste le personnage immature de Mortenn qui piaffe ; il nous a bien eu, et vlan, vlan, vlan, prédiction après prédiction, le petit enfant jubile d’avoir joué un si bon tour à ces grands bêtas d’adultes. Et nous qui avions si volontiers consenti à entrer dans son jeu nous voilà refaits, désarçonnés face à une avalanche d’impossibilités grandissantes.

Ici c’est donc du personnage que part la construction dramatique de la routine et sa multiplication des effets de prédictions. Et non pas d’un personnage de magicien surplombant qui pour accroitre son prestige, prédictions après prédictions, essaierait (vainement) d’étoffer le mystère ; mais bien d’un personnage enfantin qui a gagné notre sympathie et que l’on regarde tendrement trépigner d’avoir enfin le dessus sur les « grandes » personnes que nous sommes. Le martèlement des effets reflète la psychologie de Mortenn.

D’un point de vue magique, la rafale de révélations sature notre esprit rationnel : à peine est-il parti en chasse d’un début d’explication potentielle d’une des prédictions qu’une autre surgit encore plus mystérieuse (on n’est pas ici face à un même effet strictement répété avec des méthodes différentes qui se protègent mutuellement - voir la carte ambitieuse dans "Le Chemin Maqique" de J.TAMARIZ- mais bien face à une même carte prédite de manières très variées). Le crescendo est assuré par l’animation puérile croissante du personnage trop content de nous avoir bien eus, par des prédictions de plus en plus incompréhensibles donc (variées aussi en échelle et supports), et enfin par une série d’effets annexes qui rythment l’emballement final du numéro et brisent l’enchainement de prédictions seules : production de deux verres de jus d’orange, une carte transformée en chips, une autre en écouteurs, et même un quick change mi-foiré - l’enfant Mortenn a mis sa chemise à l’envers.

Et tout cela en harmonie avec le personnage :  on se souvient comment il avait au début joué sans ambages de sa morphologie pour péniblement extraire les cartes de son pantalon (d’ailleurs comme un callback il se dandinera une seconde fois au cours de la routine pour extraire une seule carte de son autre poche arrière), c’est cette sincérité-là vis-à-vis de ce qu’il est, physiquement et mentalement, qui fait qu’on se figure assez Mortenn se couper d’un monde compliqué pour lui avec ses écouteurs, en mangeant ses chips, parfois même peut-être essaye-t-il de socialiser en offrant des verres de jus d’orange sans voir qu’on rigole dans son dos de ce qu’il est mal fagoté. Tout un petit monde, toute une humanité simple, dans les pas dix minutes d’un « bête » tour de cartes.

***

Plus tard ce même jour alors que j’évoque avec Shawn FARQUHAR son documentaire « Lost in the Shuffle » il soupire, soulagé : enfin quelqu’un qui lui parle d’autre chose que de ce satané 4 de cœur de la compétition du matin avec Mortenn CHRISTIANSEN. Il a visiblement été assailli toute la journée par des spectateurs persuadés de sa complicité avec le magicien danois – une complicité pourtant clairement interdite par le règlement du concours.

Le 4 de cœur ?, me dit-il, c’est tout simplement la carte qui avait été choisie lors de sa propre victoire à la FISM en 2009.

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Cordialement,

Dominique

 

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