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Les Signes de l'Existence de la Réalité


Patrick FROMENT

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Je ne résiste pas au plaisir de partager avec vous un tout petit morceau de J'ai raison, tu as tort, l'ouvrage de Timothy Williamson dont j'ai parlé dans mes précédents messages. C'est une vraie initiation à la philosophie de la connaissance et il devrait ravir tous ceux qui s'intéressent (et s'interrogent sur l'idée de "vrai" ou de "faux".

La forme choisie pour l'écriture est celle du dialogue philosophique (une forme classique en philosophie depuis Socrate en passant par Berkeley).

Je rappelle le rôle de chacun des personnages : Sarah la scientifique, Pierre qui se croit victime de sorcellerie et Zac le relativiste (un rôle que j'ai souvent endossé sur ce forum 😁).

La passage qui suit traite justement de la dimension personnelle des idées et des croyances.

1.jpg.7419dd5c952714f5f91d8adea4809298.jpg2.thumb.jpg.b2130164fbe144b906324ed86649ecff.jpg3.jpg.126ae0c99152e995fce4723cafdb7560.jpg

 

Un article intéressant du Monde (pas complet mais intéressant tout de même) sur le livre :

« J’ai raison, tu as tort ! », de Timothy Williamson : certitude n’a pas d’enfants

 

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Le jour où tu te rends compte que le monde n'existe pas, la vie devient plus simple.

Paul Binocle

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il y a 37 minutes, Patrick FROMENT a dit :

Un article intéressant du Monde (pas complet mais intéressant tout de même) sur le livre :

« J’ai raison, tu as tort ! », de Timothy Williamson : certitude n’a pas d’enfants

Extrait :

« comment, au juste, prouve-t-on l’inexistence de quoi que ce soit ? »

À y bien réfléchir, on peut prouver l’inexistence d’une usine de fabrication de Coca-Cola sur Jupiter 😝. La somme des conditions et des événements sur des millions d’années ayant permis cela sur Terre est totalement incompatible avec la possibilité d’une pareille existence sur une planète gazeuse et structurée avec une histoire bien différente et dans un temps limité. Finalement, le seul vrai problème est : mais qu’est-ce qui se passe dans la tête de quelqu’un qui voudrait mettre en doute cette certitude ? Selon moi, l’improbabilité de l’existence d’une telle fabrique sur Jupiter est telle qu’il s’agit d’une preuve de non-existence. 

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il y a 9 minutes, Christian GIRARD a dit :

Selon moi, l’improbabilité de l’existence d’une telle fabrique sur Jupiter est telle qu’il s’agit d’une preuve de non-existence. 

Oui !

En fait là tu raisonnes comme un scientifique mais surtout comme un logicien (pas étonnant... l'argument de la théière de Russell vient d'un logicien). Il y a, d'ailleurs, une logicienne (Roxanna) qui vient rejoindre le dialogue de Sarah, Pierre et Zac dans le livre.

Et, à un moment, Zac le relativiste dit à Sarah la scientifique : "Sarah, vous voulez dire que la science a substitué une échelle de probabilités à une dichotomie déplacée entre le vrai et le faux ?"

(ils sont forts ces relativistes pour reformuler le propos de l'autre en en extrayant la substantifique moelle ! 😜)

Substituer une échelle de probabilités à une dichotomie déplacée entre le vrai et le faux, il me semble que c'est exactement le propos d'un argument comme la théière de Russell (ou de l'usine de Coca sur Jupiter).

Le jour où tu te rends compte que le monde n'existe pas, la vie devient plus simple.

Paul Binocle

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L'échange entre les trois participants est amusant, mais je ne suis pas sûr qu'il réponde à la question.

En insistant sur l'ascendant que prend sur l'autre celui qui croit avoir raison, Zac nous demande de considérer non pas la vérité, mais les sentiments des intervenants : en disant que j'ai raison, je sous-entends que mon point de vue est supérieur à celui de l'autre.

C'est exact, mais ça n'est pas le sujet.

Au mieux, cet extrait nous rappelle qu'un débat d'idées doit être mené avec respect, et que les idées des autres doivent être respectées ; au pire, il nous incite à arrêter le débat pour ne pas blesser notre interlocuteur.

Certes, il n'est pas agréable d'avoir tort : cela peut être vexant, frustrant, "humiliant" même, pour reprendre le terme de Timothy Williamson. Mais cela peut aussi être l'occasion de réaliser qu'on a fait une erreur, de réviser son jugement, d'affiner ses opinions et, donc, de grandir.

Prenons un exemple simple (ce n'est pas que je m'imagine que vous ne puissiez pas comprendre les exemples plus compliqués, hein : c'est juste que la démonstration sera plus facile ! 😉) et qui ne s'appuie pas sur une croyance : deux amis parlent d'un objet qui est posé sur la table. Le premier prétend qu'il est rouge, l'autre assure qu'il est orange, jusqu'à ce qu'ils comprennent que l'un des deux porte des lunettes de soleil, et que le filtre jaune altère sa perception des couleurs. Il retire ses lunettes et tout le monde admet que l'objet est bien rouge.

En l'occurrence, l'un des deux avait raison, et sa proposition (l'objet est rouge) était juste depuis le début. L'autre avait tort, il comprend la cause de son erreur et peut l'accepter. Il sera peut-être un peu vexé d'avoir commis une erreur aussi stupide, mais ça lui servira de leçon, et la prochaine fois il pensera à vérifier s'il porte ses lunettes.

Une autre approche possible aurait consisté pour les deux personnes à dire "je respecte ton point de vue, n'en parlons plus et ressers-nous un verre de rosé" (en espérant que ce ne soit pas du blanc, sans quoi on est reparti pour un tour ! 😁). Chacun serait reparti avec sa conviction, mais les rapports humains y auraient gagné ce que la vérité y aurait perdu. C'est une bonne solution pour un diplomate, mais pas pour un philosophe.

Pour toutes ces raisons, je préfère moi aussi la vérité à la diplomatie (ce qui n'empêche pas d'être mesuré et respectueux dans ses propos, naturellement !). Comme disait Aristote, Platon m'est cher, mais la vérité m'est encore plus chère.

Evidemment, dans mon exemple, les opinions découlent d'une simple affaire de perception, et l'erreur est plus facile à admettre que s'il s'agissait de remettre en question une croyance : d'une part parce que l'enjeu est minime (il plus facile de reconnaître qu'on s'est trompé pendant 5 minutes que pendant toute une vie), et surtout parce que la démonstration est facile (la preuve est plus facile à apporter que s'il fallait démontrer qu'une chose n'existe pas).

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L'important, c'est que ça valide !

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il y a 36 minutes, Patrick FROMENT a dit :

En fait là tu raisonnes comme un scientifique

… que je ne suis pas 😉

J’ai surtout utilisé des formulations claires et facilement intelligibles.  


Quel raisonnement non scientifique et non  fallacieux pourrait conduire ne serait-ce qu’à croire en la possibilité d’une usine de fabrication de Coca sur Jupiter ? L’inexistence d’une telle fabrique n’est-elle pas une certitude absolue quel que soit l’angle de raisonnement  ? 

Modifié par Christian GIRARD
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Pour continuer sur ton argument (intéressant et pertinent !), Christian, à savoir : Ce qui apparaît comme hautement improbable équivaut pratiquement à une preuve de non-existence.

J’ai trouvé sur le site de la Revue de l’Institut Polytechnique de Paris (ah ! on va pas chercher nos sources n’importe où sur ce fil) une critique rigoureuse et assez facile à lire de l’hypothèse de simulation de Nick Bostrom :

Comment savoir si nous vivons dans une simulation ?

Faudra un jour que je fasse un petit développement sur la pertinence de la statistique bayésienne sur ce genre d’hypothèse… Pas sûr que la statistique bayésienne soit un outil très pertinent en l’occurrence dans ce cas (tout comme pour la question de l'existence de Dieu). Pas le temps et pas le courage là… C’est un assez gros morceau. On verra autour de la page 350 de ce fil si ça vaut le coup de s’y atteler ! 😃

Le jour où tu te rends compte que le monde n'existe pas, la vie devient plus simple.

Paul Binocle

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il y a 4 minutes, Alx a dit :

Prenons un exemple simple (ce n'est pas que je m'imagine que vous ne puissiez pas comprendre les exemples plus compliqués, hein : c'est juste que la démonstration sera plus facile ! 😉) et qui ne s'appuie pas sur une croyance : deux amis parlent d'un objet qui est posé sur la table. Le premier prétend qu'il est rouge, l'autre assure qu'il est orange, jusqu'à ce qu'ils comprennent que l'un des deux porte des lunettes de soleil, et que le filtre jaune altère sa perception des couleurs. Il retire ses lunettes et tout le monde admet que l'objet est bien rouge.

En l'occurrence, l'un des deux avait raison, et sa proposition (l'objet est rouge) était juste depuis le début. L'autre avait tort, il comprend la cause de son erreur et peut l'accepter. Il sera peut-être un peu vexé d'avoir commis une erreur aussi stupide, mais ça lui servira de leçon, et la prochaine fois il pensera à vérifier s'il porte ses lunettes.

Euh... ce n'est sans doute pas le meilleur exemple (les qualia)... Je crois qu'on a déjà évoqué une vidéo de David Louapre à ce sujet alors j'en poste une autre :

Bon, allez :

 

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Il y a 1 heure, Christian GIRARD a dit :

Euh... ce n'est sans doute pas le meilleur exemple (les qualia)...

Oui, j'y avais pensé, notamment par rapport au daltonisme, mais je voulais un exemple simple 😜

Ceci dit, le fait que les couleurs soient interprétées ne pose pas vraiment de problème dans mon exemple : peu importe que les deux amis ne "voient" pas le rouge de la même manière, ce qui compte, c'est qu'ils tombent d'accord une fois que les lunettes sont éliminées (il est possible que chacun perçoive le rouge d'une manière différente, mais la couleur de l'objet est bien reconnue par chacun comme du rouge, à la fin).

Les plus tâtillons pourront compléter l'histoire en disant que les deux amis ont suivi les explications de Scilabus pour fabriquer un spectromètre et vérifier la longueur d'onde réfléchie par l'objet en question (mais après, qu'on ne vienne pas se plaindre que mes exemples sont trop tirés par les cheveux ! 😅)

Enfin bref, si ça vous fait plaisir, on peut choisir un sujet complètement différent, pour autant qu'il existe un moyen de vérification objectif. Par exemple, le point de désaccord peut concerner l'orthographe d'un mot  (il suffira alors d'ouvrir un dictionnaire pour mettre tout le monde d'accord).

C'est d'ailleurs un cas intéressant : quand deux amis ne sont pas d'accord sur la façon d'écrire un mot, est-il préférable de dire "je respecte ton opinion même si je ne la partage pas, n'en parlons plus", ou d'insister pour vérifier ("non, mais je t'assure, caillou, au pluriel, ça prend un x !") ?

C'est probablement déjà arrivé à tout le monde ici (moi en tout cas, ça m'arrive tout le temps 😅), et je reste convaincu qu'il faut en avoir le coeur net : ouvrir un dictionnaire, c'est le meilleur moyen de savoir qui a raison mais, surtout, c'est le meilleur moyen pour qu'aucun des deux ne fasse plus cette faute. Personnellement, je trouve moins humiliant d'avoir eu tort 5 minutes face à un ami que tout le reste de ma vie (en terminant tous mes courriers professionnels par "gros bisoux !" 😁)

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Exemple d'un raisonnement bayésien appliqué à l'hypothèse théiste :

Inférence bayésienne, simplicité et probabilité a priori du théisme

Tout le côté "lunaire" d'un tel raisonnement apparaît clairement (selon moi) dans la conclusion (ainsi que les a priori épistémologiques) :

Citation

 

L’abduction – et l’inférence bayésienne qui en est une version rigoureuse s’appuyant sur la notion de probabilité a priori – est un procédé courant de raisonnement qui consiste en la formation d’une hypothèse pour expliquer un ensemble surprenant de données. Lorsque cette hypothèse ne peut pas se soumettre au contrôle de l’expérience, elle est généralement écartée comme « irréfutable ». Cependant, il arrive que des hypothèses « irréfutables » soient conservées du fait de leur simplicité intrinsèque, par exemple. C’est ainsi le cas des entités théoriques de la physique. Le théisme, d’un point de vue scientifique, se présente comme une hypothèse « irréfutable ». Nous avons cependant montré que le principe de simplicité ne conduisait pas spécialement à le retenir comme a priori probable, la simplicité du théisme étant grandement illusoire par rapport à d’autres hypothèses métaphysiques monistes et naturalistes. 

 

Je serais intéressé d'avoir des articles similaires pour tester d'autres hypothèses métaphysiques... "Inférence bayésienne, simplicité et probabilité a priori du multivers" serait un bon titre. Là-priori naturaliste influe-t-il l'inférence bayésienne ? 😄

Le jour où tu te rends compte que le monde n'existe pas, la vie devient plus simple.

Paul Binocle

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il y a 14 minutes, Alx a dit :

Oui, j'y avais pensé, notamment par rapport au daltonisme, mais je voulais un exemple simple 😜

Ceci dit, le fait que les couleurs soient interprétées ne pose pas vraiment de problème dans mon exemple : peu importe que les deux amis ne "voient" pas le rouge de la même manière, ce qui compte, c'est qu'ils tombent d'accord une fois que les lunettes sont éliminées (il est possible que chacun perçoive le rouge d'une manière différente, mais la couleur de l'objet est bien reconnue par chacun comme du rouge, à la fin).

Indépendamment du fait qu'une pomme n'est vraiment rouge que sous une lumière adéquate (disons blanche, celle du jour) et que, éclairée par une lumière rouge, elle apparaît comme encore plus rouge, une pomme dite rouge peut être beaucoup de "choses" sauf... de couleur rouge ! Le rouge est justement ce qui n'est pas inhérent à la pomme dite rouge. Mon explication ici (avec une pomme verte pour changer un peu 😉) :

https://virtualmagie.com/forum/sujet/22298-les-signes-de-lexistence-de-la-réalité/?do=findComment&comment=403420

 

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