Aller au contenu
Pas de pub non magique pour les membres du Cercle VM. Clique ici pour en savoir plus !

Recommended Posts

Publié le

Bon, je suis un peu moins actif en ce moment pour deux raisons : un projet extra-professionnel dont vous entendrez parler d'ici quelques mois (j'espère) et qui me prend du temps, et ensuite au boulot le système de sécurité m'empêche désormais de poster sur les forums, une honte j'vous dis de même plus pouvoir être payé à surfer... mais je peux quand même vous lire, ouf !

Richard Vollmer nous livre ici une compilation/traduction des plus grands effets publiés dans la revue Hierophant.

Vous pouvez trouver ce livre chez Ludo à cette adresse pour 28 €. (oui oui ça y est j'ai des parts chez lui!)

J'étais lamentablement passé à côté de ces VBO parce que croyais, en apercevant d'un coup d'oeil les couvertures (qui me semblaient vieillotes, voire ringardes) qu'il s'agissait d'une grande série et que dans ces cas là ma réaction est : tout avoir ou ne rien avoir. Boulet un jour....

Moralité, pour ce prix dérisoire j'ai fini par foncer et je ne le regrette pas. Déjà, le livre a ce parfum des livres d'antan au papier épais, un peu jauni, qui a la bonne odeur d'un livre qu'on lit l'été, entre deux siestes... et déjà ça a un charme fou ! (on croirait du Pagnol)

Il commence par un essai sur la caricature de l'expert cartomane. Beaucoup, beaucoup d'humour dans cette critique au vitriol qui semble n'avoir pas pris une ride et qui permet de reprendre un peu d'humilité pour sa pratique.

- Hands off reverse (Anonyme) : tout se passe dans le dos du spectateur. La carte est nommée et retrouvée face en haut. Ultra simple, mais un effet je pense dévastateur. Je suis déjà conquis.

- Permutation (Marlo) : Inversion + Transposition d'as en roi. Il parle ici d'étalement d'Amico (??). On a l'impression que le livre fait parfois référence à des techniques très en vogue à une époque, et oubliées depuis. Je ne suis pas convaincu, mais mon manque de temps pour les recherches me fait peut-être passer à côté de cette routine...

- Le tour de la princesse (Walton) : le grand classique de la magie de petit paquet. Un régal assez facile, et au finale surprenant.

- Coup double (Marlo) : UN bémol ici, encore une fois on cite une technique sans l'expliquer, même succintement : l'ATFUS. Oui, c'est un grand classique, mais quand on ne le pratique pas et qu'on ne l'a pas dans les doigts, c'est dommage. (Je reviendrai sur ce point) Il induit au spectateur qu'il choisit la bonne carte puisqu'il ne la voit plus. Je reste intrigué par cet effet que je n'ai pas pu tester et où le spectateur retrouve deux fois la carte à laquelle il pense dans un groupe de cartes faces en bas.

- Le pouvoir de l'argent ( Swinford) : Comment se donner beaucoup de mal pour produire un carré : 3 faros sur un petit carré. La sélection naturelle joue à plein, je n'ai même pas tenté de le reproduire. Quitte à faire 3 faros devant le public, je préfère "UNshuffled" de Gertner (même si l'effet n'a rien à voir).

Un nouvel essai, de Marlo, sur le forçage de Henry Christ, que j'aime BEAUCOUP (le forçage, pas Henry... ). Là je bois du petit lait, TOUTES ces variantes me plaisent et m'attirent, je n'ai pas fini de jouer avec les nombreuses subtilités que permet ce forçage !

- 3² (Johnson) : dès la description, je n'ai pas envie de le faire. Le montage de 24 cartes réparties dessus/dessous, ça sent bon les mathématiques à 3 bornes !

- Coucou me revoilou ! (Marlo) : C'est une très jolie farce, mais est-elle magique ? 2 spectateurs et le magicien choisissent la même carte, voilà qui peut tout de même constituer un interlude très sympa, entre deux tours plus fort. Après tout, il faut savoir ménager des temps de "repos", non ?

- Mirabile Dictu (Bendix) : un effet de carte retrouvéen sachant qu'il faut réaliser le fameux "Prayer Cull" de Marlo, que tout le monde pratique, et qu'il n'est donc pas nécessaire d'expliquer (). Outre la séparation rouge noire, cela nécessite un faro et un mélange Mongue "que je ne décrirai pas ici puisqu'il est connu de tous" (citation exacte).

Nouvel essai sur la théorie du tour trop parfait.

"Un spectateur n'est jamais mystifié par un magicien, où alors très rarement" Dai Vernon.

C'est une réflexion que j'ai eue précédemment sur ma magie, et engendre ce paradoxe : affaiblir l'effet pour mettre le spectateur dans plus d'impasses. On rejoint certainement Tamariz (qu'il faut que je lise), mais une nouvelle plein de réflexions très intéressantes.

- Le sandwich à retardement (Marlo) : ressemble à la description de Search & Destroy d'Aaron Fisher et que j'aime beaucoup (le tour, pas Aaron - encore qu'il soit très bon pédagogue !). Je préfère R&D, mais partant du principe que c'est sûrement ce qui a servi ici de genèse à S&D, je ne peux qu'applaudir !

- Viet-Nam (Cervon + Vernon) : Voilà ma Légende Urbaine à moi (mieux que CC), le tour dont j'avais TOUJOURS entendu parler depuis que j'ai débuté la magie, et que je n'avais jamais vu/lu... Avec cet effet incroyable de double prédiction à la famille, à la valeur, et au nombre, qu ia besoin du dernier ACAAN à la mode ?

Impromptu, pas de préparation, peu être réalisé avec un jeu emprunté (et même incomplet), répétable à loisir... C'est sans aucun doute mon coup de cœur !

- What a Pythie ! (Marlo + Lichter) : cet effet semble prometteur, une carte est nommée, le jeu est distribué en retournant les cartes, sauf une. La carte laissée face en bas était la carte nommée. On a la solution + l'effet si tout ne se passe comme prévu. On a ici une des applications intéressantes du chapelet, à voir si je me sens de l'utiliser. Du genre à faire phosphorer.

- Sober Slop Poker (Marlo) : le jeu est mélangé pêle-même FEH FEB, des mains de poker sont données, toutes les cartes sont FEH sauf celles du magicien, les 4 as. On remet le boxon et toutes les cartes sont dans le même sens, sauf les 4 as. Déjà, se souvenir de la procédure est une gageure. C'est une démo de triche plus que de magie, assez bof à mes yeux, et ne requiert que 2 faro (woohoo !)...

- Un sandwich de dernière minute (Muller + Elmsley) : cette fois-ci l'ATFUS est expliqué, mais pas le controle Kelly-Ovette, qui est pourtant "la solution la plus rapide et la plus économique", lol. La description fait encore une fois penser à S&D, à tel point qu'à ce jour je ne suis toujours pas décidé sur la version que je préfère... cumulé avec le Blitz à la Chelman, de quoi faire du sandwich en veux tu en voilà plus vite que la SNCF ! Une belle réussite également.

- The Chicago Miracle (Marlo) : 2 faros pour un effet réalisable beaucoup plus simplement et qui associe un nombre de cartes coupées à une carte. A part le fait que rien ici n'est forcé Viet-Nam est beaucoup plus abordable ! Et quelque chose me dit que Maven a (il y a un certain temps et sous un autre nom) publié des choses qui y ressemblent et dont on ne devrait pas tarder à entendre parler...

- Poste restante (Marlo) : La simple lecture de cet effet de prédiction avec timbre m'a tellement peu plu, que je n'en ai pas lu l'explication. La faute à moi ou au moment, mais je n'ai pas d'avis sur cette routine

- Psychedelic location (Marlo) : on a ici presqu'un ACAAN, mais ne manque-t-il pas un peu de subtilité ?

- Le spectateur coupe sur les as (Marlo) : c'était peut-être pas mon jour, mais au secours la clarté des explications (pourtant l'ensemble du livre est exceptionnellement bien écrit)... L'effet est réalisable beaucoup plus simplement, mais ça a le grand avantage de bien faire réfléchir, tout est donc bon à prendre.

- Le sandwich des valets borgnes (Marlo) : Encore une très belle piste de réflexion sur l'effet du sandwich. Je reste donc pour l'instant sur les pistes précédentes et qui n'utilisent pas de gimmick qui ici ne me convainquent pas (mais qui sait ?...). Je me pose en revanche des questions sur la cover-up cut, qui n'est pas décrite.

Essai sur la 2e partie de l'expert cartomane (Bendix). Encore du petit lait d'humour concentré caustique et saupoudré d'ironie avec un zest d'acide vitriolé. Du bonheur !

Conclusion :

Ce livre est en version française, ceux qui ne parlent pas anglais n'ont donc aucun prétexte... Tout est expliqué simplement en 1 ou 2 pages, ça s'enchaine très vite. En revanche il n'y a quasi pas d'explication.

Concernant les techniques, on regrette qu'elles ne soient pas expliquées... c'est parfois déroutant. L'ATFUS est nécessaire dans une première routine mais pas expliqué, pour n'être expliqué que plus tard dans le livre. Mais la première routine n'a même pas un renvoi disant "la technique est expliquée en page xx". Dommage. Pour les autres, bon courage pour le travail de biblio.

Enfin, je fais ici et là quelques remarques sur le Faro. Je n'ai rien contre ce mélange, que je pratique un peu. Cependant je peste ici un peu car il est utilisé, c'est mon impression, à tort et à travers pour des effets réalisables simplement. Mais les applications de ce mouvement restent incroyables.

Ce livre m'a beaucoup plus, beaucoup de réflexion en découle, et Viet Nam a définitivement intégré mon répertoire. Il m'a donné envie de me procurer le VBP Harry Lorayne ainsi que le VBO Aronson.

C'est mon meilleur achat de 2012 (tu m'étonnes, avec la commande passée le 02/01 ), et je pense que je ne vais avoir de cesse d'y revenir encore et encore.

David

mnemonaute_tn.jpg

Pas de pub non magique pour les membres du Cercle VM. Clique ici pour en savoir plus !
  • Réponses 34
  • Créé
  • Dernière réponse

Membres les + Actifs

Publié le

Merci beaucoup pour ce CR hyper détaillé et très bien rédigé ! Ca manque un peu ces temps-ci sur VM.

P.S. Le VBO Aronson est une merveille d'intelligence. A mon avis, c'est un incontournable, même pour quelqu'un qui ne maîtrise aucun chapelet, ce qui est mon cas (la moitié du livre est consacré à ce sujet).

Publié le (modifié)

Merci , je viens d’acquérir ce mois ci Very Best of Simon Aronso 380 pages

Very Best of Harry Lorayne 255 pages

et Corrinda 13 Steps to Mentalism nouvelle édition

et c'est très bon , pareil que toi l'effet de la couverture vieillotte mais j'ai lu tellement de bonne critique dessus !

Je me suis dit allez on va voir...

Les effet sont très bons, c'est bien écrit, agréable à lire !

Modifié par Jérémie FONTAINE
Publié le (modifié)

Pour info, je peux vous affirmer que lorsque Richard écrit un Very Best of, il a auparavant lu toute l'oeuvre de l'auteur...ensuite le choix est effectivement fait selon son "bon vouloir" et sa manière de percevoir le tour...et là....il est difficile de plaire à tout le monde, mais au moins, il peut donner l'envie d'aller voir plus loin en donnant une idée sur la magie de l'auteur.

Modifié par tabary

http://www.francistabary.fr/

Créer est divin, copier est humain .

Publié le

salut Chakkan

concernant les VBO, celui d'Aronson est super, mais une partie est réservé au tours utilisant un chapelet. Si tu en connais déjà un ou si tu comptes en apprendre un, fonce sur ce livre.

Le monde se divise en deux catégories : ceux qui ont un pistolet chargé, et ceux qui creusent. Toi, tu creuses ...

Publié le

Justement, c'est parce que je me suis donné la peine de connaître le Mnemonica que ça me fait tilt pour Aronson, étant donné que si j'ai bien compris il ne cherche pas à convertir à SON chapelet, mais bien à appliquer des principes quel le lecteur rapportera au(x) chapelet(s) qu'il connaît.

Mais bon, je me suis fixé avant de lire Stutzinger, Invraisemblances, et InterMead, soit quelques mois de travail en perspective.

Je savoure ma bibliothèque comme une bonne vinothèque, je regarde les livres vieillir comme de bonnes bouteilles et j'en tire à l'avance un plaisir anticipé des merveilles qu'ils doivent déceler et dont je n'ai pour l'instant aucune idée. Mais que c'est bon le rêve et le désir... c'est déjà de la magie.

David

mnemonaute_tn.jpg

Rejoins la conversation !

Tu peux publier maintenant et t'enregistrer plus tard. Si tu as un compte, connecte-toi maintenant pour publier avec ton identité.

Invité
Répondre à ce sujet…

×   Vous avez collé du contenu avec mise en forme.   Restaurer la mise en forme

  Only 75 emoji are allowed.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédemment saisis, a été restauré..   Effacer le contenu

×   You cannot paste images directly. Upload or insert images from URL.



  • Pas de pub non magique pour les membres du Cercle VM. Clique ici pour en savoir plus !
  • Messages

    • Je reviens au sujet du livre, car c'est ce que j'ai choisi comme lecture récréative pour les vacances. La citation de Pierre Etaix sur la 4e de couverture a failli me faire passer pour un intellectuel auprès de mes beaux-parents (chez qui je passe une partie desdites vacances) parce qu'ils sont très... "Télérama". Mais j'ai senti à la tête de belle-Maman quand elle a vu la couverture (pourtant dudit Pierre Etaix) et à l'attitude de beau-Papa quand il a feuilleté le livre que leur furtif espoir de s'être trompés sur le compte du zigoto choisi par leur fille pour leur faire des petits-enfants avait encore été déçu.  J'en suis à la page 183, ça se lit agréablement. C'est étonnamment bien écrit pour quelqu'un qui a appris le français en écoutant Coluche. Je me suis marré plusieurs fois à voix haute et j'ai été étonné d'y trouver quelques remarques qui m'ont fait réfléchir sur la construction d'un numéro (dans le chapitre consacré au Champion de l'élégance). Par contre, je ne regarderai plus jamais les saucisses de Strasbourg de la même manière.  Une remarque négative, cependant, à @Otto WESSELY : pourquoi ne pas avoir mis la photo de la page 174 EN COULEURS, vu que tu dis qu'elle est belle en couleurs ?! Quelle frustration ! (Les autres, je vous entends penser "Frustration totale !", je lis dans vos pensées, je suis le plus grand des mentalistes). Je la trouve super, j'aimerais l'avoir en haute résolution pour l'imprimer en poster. Merci d'avance. Bisous. Un admirateur  (Je n'ai pas le courage de me taper les 36 pages du sujet pour voir si la question de ladite photo a déjà été soulevée)
    • Et si l'on parle de "bouffée de l'humanité" : quelques portraits de la Fism à Rimini, là où l'humanité était encore plus palpable.... Qui me cite les noms ?   
    • Bonjour, Heureux si j'ai pu partager avec certains quelques unes des émotions ressenties pendant les six jours de cette FISM. À propos d'émotions, le numéro du 1er prix en magie de salon en débordait. (précision : lors de son second passage sur "Fool Us" le tout début de ce numéro a déjà été montré : si vous ne l'avez pas déjà vu...alors tant mieux, gardez-vous de le regarder, vous vous gâcheriez une partie du plaisir de la version intégrale) *** Asi WIND dans « Incredibly Human » ou Derren BROWN dans son dernier livre se posent la même question : pour que dans un spectacle vivant et interactif une émotion sincère puisse naître, il faut que surgisse une connexion authentique entre l’artiste et son public. Dès lors, comment concilier en magie cette authenticité de la relation humaine avec un art qui est, lui, tout entier tourné vers l’artifice ? Ce jeudi 17 juillet à TURIN au matin, lors de la compétition de magie de salon, Mortenn CHRISTIANSEN a à sa manière si particulière fait surgir cette bouffée d’humanité dans un auditorium comble. *** Dès le départ tout est allé de travers pour le candidat danois Mortenn CHRISTIANSEN, appelé sur scène alors qu’il n’était absolument pas prêt. Mais alors pas prêt du tout, du tout, du tout. Le jeune homme bien portant boulottait des chips en douce dans les coulisses au moment d’entrer en scène, mais dans la précipitation, c’est la cata : sa main droite s’est coincée dans son tube de chips. Son désarroi est palpable. Pour tenter de sauver la mise de demander malgré tout une carte à un spectateur (Shawn FARQUHAR s’y colle, va pour le 4 de cœur) avant de s’apercevoir que son paquet de cartes est coincé dans la poche arrière droite de son pantalon -pas de bol, pile du côté de sa main bloquée dans le paquet de chips : au prix de moult contorsions Mortenn parvient à faire remonter peu à peu le paquet de cartes qui émerge de sa poche et finit par chuter sur scène. Il le ramasse de sa seule main libre -la gauche- sort les cartes et enchaine une série de piètres manipulations d’une main. Les maladresses succèdent aux maladresses, Mortenn peste, marmonne combien il n’était pas prêt, laisse lamentablement choir toujours plus de cartes, bref sa prestation tourne à l’embarras complet. Mais attendez, voilà que Mortenn ne tient plus qu’une seule carte, dos au public…se pourrait-il ? *** À cet instant la routine bascule : Mortenn fanfaronne : « Eh eh…vous avez cru que je n’étais pas prêt…et bien c’était pour de faux, j’étais prêt, archi-prêt… ». Qu’on se le tienne pour dit, on va voir ce qu’on va voir. Non pas bien sûr que quiconque dans la salle ait réellement cru à la farce de Mortenn pas prêt – même si cette séquence du pauvre garçon en prise aux pires coups du sort aura quand même suffit à susciter notre empathie immédiate envers lui-, mais nous voilà, nous dans la salle, passés en un clin d’œil de spectateurs à spect-acteurs, projetés dans le rôle qui nous est assigné : celui d’adultes face à un petit enfant trop content d’avoir roulé son monde dans la farine ; et nous allons, pour lui faire plaisir, faire comme si nous avions effectivement gobé la bonne blague de sa déroute feinte. Par sa personnalité scénique et sa mise en scène, ayé, le (vrai) tour est joué : le bras de fer potentiel public-magicien est illico désamorcé, nous consentons à entrer dans le monde de Mortenn, nous jouons à faire comme si nous avions vraiment cru qu’il était pris de court, et ainsi nous nous livrons pieds et poings liés au garnement. Mortenn est un enfant mais pas à la manière mettons d’un Rubi FEREZ- enfant lunaire, rayonnant et malicieux, qui s’émerveille de tout. Non, pour Mortenn le monde est vaste et compliqué ; puéril et hypersensible (donc hyper-attachant) il est en butte aux gens et aux choses qui le rendent bien, bien, malheureux. Et la magie est son salut. Et la vraie magie est que tout le reste de la routine va puiser sa justification précisément dans le personnage même de Mortenn CHRISTIANSEN, dans sa « revanche » face aux grandes personnes. *** Car à cet instant la routine bascule aussi en termes de nature d’effet magique : on va passer d’une démonstration burlesque d’habilité à retrouver une carte par des manipulations faussement maladroites, à un tout autre effet : une prédiction. Ou plutôt des prédictions. Les magiciens ont sans doute tendance à surestimer l’impact réel des effets de prédiction sur leur public, et, pour donner un semblant de construction dramatique à leur numéro, à multiplier les révélations sur le mode : « vous avez librement choisi le 4 de cœur…observez miracle ! C’est la seule carte à dos rouge dans ce paquet bleu… non seulement cela, mais j’ai aussi un 4 de cœur tatoué sur mon bras…et attendez un peu…une carte et une seule dans mon portefeuille le 4 de cœur… ». Le kicker jusqu’à plus soif. La surenchère de prédictions au lieu de décupler l’effet bien souvent l’amoindrit. On avait saisi le message dès la première prédiction révélée : ok le magicien a prévu l’avenir, quel besoin a-t-il donc de nous le « prouver » encore et encore ? L’insistance superflue éveille la suspicion : lors d’un spectacle vu il y a quelques temps j’entendis ainsi soupirer un spectateur au moment de la « trop parfaite » énième révélation : « Bon ok donc c’est le 4 de cœur tous les soirs... » (sic) (pages 46-47 de « Notes from a Fellow Traveler » D.BROWN explique la réécriture du final de son show « Enigma » suite à un exemple semblable d’accumulations d’effets redondants qui s’affaiblissaient mutuellement au lieu de créer la montée dramatique escomptée). Mortenn CHRISTIANSEN va réemployer cette structure « discutable » et lui aussi multiplier les prédictions de la carte choisie -au moins 5 de mémoire : alors pourquoi ici cela fonctionne-t-il si bien, jusqu’à déclencher une standing ovation ? Premièrement le choix initial est on ne peut plus convaincant, transparent : le spectateur nomme librement la première carte qui lui passe par la tête -le jeu n’est même pas encore sorti, et puis quelles manipulations possibles avec une main fourrée dans un paquet de chips ? Comme notre esprit rationnel est tranquillisé de ce côté-ci par une procédure rapide et limpide, il va se faire d’autant plus facilement submerger ensuite par notre esprit émotionnel. Car, deuxièmement, l’accumulation de révélations de prédictions de cette carte est motivée dramatiquement (et donc notre esprit rationnel le cède d’autant plus aisément à notre esprit émotionnel) : c’est juste le personnage immature de Mortenn qui piaffe ; il nous a bien eu, et vlan, vlan, vlan, prédiction après prédiction, le petit enfant jubile d’avoir joué un si bon tour à ces grands bêtas d’adultes. Et nous qui avions si volontiers consenti à entrer dans son jeu nous voilà refaits, désarçonnés face à une avalanche d’impossibilités grandissantes. Ici c’est donc du personnage que part la construction dramatique de la routine et sa multiplication des effets de prédictions. Et non pas d’un personnage de magicien surplombant qui pour accroitre son prestige, prédictions après prédictions, essaierait (vainement) d’étoffer le mystère ; mais bien d’un personnage enfantin qui a gagné notre sympathie et que l’on regarde tendrement trépigner d’avoir enfin le dessus sur les « grandes » personnes que nous sommes. Le martèlement des effets reflète la psychologie de Mortenn. D’un point de vue magique, la rafale de révélations sature notre esprit rationnel : à peine est-il parti en chasse d’un début d’explication potentielle d’une des prédictions qu’une autre surgit encore plus mystérieuse (on n’est pas ici face à un même effet strictement répété avec des méthodes différentes qui se protègent mutuellement - voir la carte ambitieuse dans "Le Chemin Maqique" de J.TAMARIZ- mais bien face à une même carte prédite de manières très variées). Le crescendo est assuré par l’animation puérile croissante du personnage trop content de nous avoir bien eus, par des prédictions de plus en plus incompréhensibles donc (variées aussi en échelle et supports), et enfin par une série d’effets annexes qui rythment l’emballement final du numéro et brisent l’enchainement de prédictions seules : production de deux verres de jus d’orange, une carte transformée en chips, une autre en écouteurs, et même un quick change mi-foiré - l’enfant Mortenn a mis sa chemise à l’envers. Et tout cela en harmonie avec le personnage :  on se souvient comment il avait au début joué sans ambages de sa morphologie pour péniblement extraire les cartes de son pantalon (d’ailleurs comme un callback il se dandinera une seconde fois au cours de la routine pour extraire une seule carte de son autre poche arrière), c’est cette sincérité-là vis-à-vis de ce qu’il est, physiquement et mentalement, qui fait qu’on se figure assez Mortenn se couper d’un monde compliqué pour lui avec ses écouteurs, en mangeant ses chips, parfois même peut-être essaye-t-il de socialiser en offrant des verres de jus d’orange sans voir qu’on rigole dans son dos de ce qu’il est mal fagoté. Tout un petit monde, toute une humanité simple, dans les pas dix minutes d’un « bête » tour de cartes. *** Plus tard ce même jour alors que j’évoque avec Shawn FARQUHAR son documentaire « Lost in the Shuffle » il soupire, soulagé : enfin quelqu’un qui lui parle d’autre chose que de ce satané 4 de cœur de la compétition du matin avec Mortenn CHRISTIANSEN. Il a visiblement été assailli toute la journée par des spectateurs persuadés de sa complicité avec le magicien danois – une complicité pourtant clairement interdite par le règlement du concours. Le 4 de cœur ?, me dit-il, c’est tout simplement la carte qui avait été choisie lors de sa propre victoire à la FISM en 2009.
  • Statistiques des membres

    • Total des membres
      8225
    • Maximum en ligne
      4524

    Membre le plus récent
    Claude MAUGUIT
    Inscription
  • Statistiques des forums

    • Total des sujets
      84k
    • Total des messages
      679k

×
×
  • Créer...