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Effet Barnum et Métaphysique


Patrick FROMENT

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Il y a 8 heures, Shiva a dit :

L’effet Barnum c’est un peu comme ce jeu qui consiste à avoir un nuage de points numérotés et à relier ces points par des lignes révélant ainsi une figure ou un dessin.

Avec l’effet Barnum, il y a juste un nuage de points, aucune numérotation. Ce qui fait que l’esprit du spectateur peut relier les points à sa guise, faire les liens qu’il veut et obtenir la figure qu’il souhaite.

Les points représentent métaphoriquement les assertions (ou les  "lines") les traits correspondant à la construction de sens que le spectateur va établir.

Le lien avec la métaphysique ?

Notre esprit est une machine à construire du sens. 

A partir d’éléments factuels épars tels que des sensations corporelles, des pensées qui surgissent dans notre conscience et quelques souvenirs nous nous bâtissons une identité, un Moi.

A partir de ce qui n’est que des perceptions nous inférons un monde à l’extérieur de nous.

L’interprétation que je formule ici est, elle même, une construction de sens, un effet Barnum sur l’effet Barnum. Rien de grave à cela. La plupart des questions métaphysiques prêtent le flanc à une régression à l’infini. :)

3-points-a-relier-158.jpg

Pas mal comme image ! :)

Après les points, bien que non numérotés, sont placés là où il sont. On ne peut donc pas les reliés n'importe comment sous peine que ça ne ressemble à rien en final.

Quand je regarde cette image sans faire gaffe au numéros, je vois un chat, un chien, une souris,... Mais certainement pas un camion, une piscine, ou un poisson.

Modifié par Maxence MURA

Le Diable me suit de jour et de nuit car il a peur d'être seul.

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Le 26/02/2015 à 16:46, Shiva a dit :

Explication liée à la psychologie :

Il y a un phénomène connu en psychologie sous le nom de recadrage . La PNL s’en est beaucoup emparé mais c’est quelque chose de très ancien. Le recadrage est une opération cognitive qui consiste à donner un autre sens à une expérience vécue, un message ou un signe que le sens initial. On peut parler, aussi, tout simplement, d’interprétation.

Explication vaste de type philosophique-métaphysique :

Il est dans la nature de l’esprit humain de projeter sa subjectivité sur le monde. Chaque phénomène, message ou signe, quel qu’il soit, est toujours interprété et appartient à la subjectivité de celui ou celle qui en fait l’expérience en première personne.

Hello,

En quoi le deuxième type d'explication n'est pas aussi "psychologique" ? La projection étant -il me semble- un concept important de la psychologie/psychanalyse?

J'ai du mal (mais ça ne date pas d'hier) à comprendre ce qu'on entend par "métaphysique". Merci de m'éclairer :)  

(et pensez vous à des auteurs en particulier en vous référant à cette notion ? )

bien a vous

bonne soirée

"L'illusion au service de l'art, voilà notre culte." N.F.

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Bonjour Azoth,

La métaphysique est effectivement une discipline aux contours mal définis.

Elle est une branche de la philosophie mais une branche que les philosophes d'aujourd'hui ont, hélas, désertés largement pour la laisser aux spiritualistes et ésoteristes de tout poil. Ce qui est bien dommage.

Pour faire simple la métaphysique, pour moi, est l'etude et la réflexion de ce que les choses sont en elles-mêmes, indépendamment de nos représentations. En ce sens elle est proche de l'ontologie (l'étude de l'être en tant qu'être).

Cette définition rapide montre bien le projet impossible de la métaphysique  : Nous ne pourrons,en effet, jamais connaître les choses telles qu'elles sont en dehors de nos perceptions et de nos représentations. Cela veut-il dire que la métaphysique soit destinée à n'être qu'un discours creux et stérile maniant uniquement des hypothèses et des croyances ? Je ne le pense pas.

Plus qu'une connaissance, la métaphysique est une réflexion, une démarche intérieure et cette démarche intérieure est transformatrice. Rien que le fait de prendre conscience que je ne connaitrais jamais les choses en dehors de mes perceptions et de mes représentations,  rien que cette simple et évidente constatation, si vous la poussez dans ses derniers retranchements produit, à mon avis, une transformation et une vision nouvelle des problèmes concrets de la vie quotidienne.

La question "pourquoi y a t il quelque chose plutôt que rien ?" ou "pourquoi le monde existe ?" sont des questions métaphysiques. Les questions de savoir ce qu'est la nature ultime de la réalité et quelles sont ses liens avec la conscience sont aussi des questions métaphysiques. L'idée même de base de la science : celle qui pose l'existence d'un monde de matière à l'extérieur de nous est, elle même, une conception métaphysique (on peut tout à fait imaginer d'autres explications pour expliquer nos perceptions). 

Bon revenons à nos moutons (l'effet Barnum). L'explication "metaphysique " que je propose est certes proche de l'explication psychologique (sur laquelle elle prends, d'ailleurs, appui) mais elle va un peu plus loin : elle pose l'esprit humain comme une sorte de machine à projeter sa réalité  (c'est à dire son identité et son environnement) et donc à creer du sens à partir d'elements épars qui ne sont finalement que des perceptions et des pensées.

Cette vision de l'effet Barnum pour arriver à des conceptions d'ordre métaphysique est certes très extensive. C'est une extrapolation certainement un peu osée  (voire tirée par les cheveux) mais il y a d' autres cas ou des considérations d'ordre psychologique débouchent sur une réflexion métaphysique (chez Jung par exemple et son inconscient collectif).

Sinon pour les auteurs, pourriez vous préciser à quelle notion vous faites référence ?
 

Modifié par Shiva

Le jour où tu te rends compte que le monde n'existe pas, la vie devient plus simple.

Paul Binocle

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J'ajoute un petit mot : J'ai cru comprendre, cher Azoth, que vous êtes ,tout comme moi, un inconditionnel de Eugène Burger...

Lequel Eugène Burger était fasciné par LA question métaphysique essentielle : QUI SUIS JE ?

;)

Le jour où tu te rends compte que le monde n'existe pas, la vie devient plus simple.

Paul Binocle

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Il y a 11 heures, Shiva a dit :

Rien que le fait de prendre conscience que je ne connaitrais jamais les choses en dehors de mes perceptions et de mes représentations,  rien que cette simple et évidente constatation, si vous la poussez dans ses derniers retranchements produit, à mon avis, une transformation et une vision nouvelle des problèmes concrets de la vie quotidienne.

Il y a 11 heures, Shiva a dit :

l'esprit humain comme une sorte de machine à projeter sa réalité

ces deux éléments, croisés avec la définition donnée de la métaphysique, j'aurais tendance à persévérer dans mon idée que tout cela reste "psychologique". La constatation n'ayant d'ailleurs rien de réducteur ou de péjoratif.

Mais peut être recourez vous à cette notion pour échapper à une "psychologie psychologisante" de bas étage, pour tenter de désigner une psychologie plus profonde, et les mécanismes du mental ?

Pour moi la question de la création du sens n'est pas métaphysique (mais c'est peut etre là mon erreur). La diversification des sciences humaines au XXe siècle a sans doute trop rogné le domaine de la métaphysique et en a obscurcit la compréhension initiale ?

 

Il y a 11 heures, Shiva a dit :

Sinon pour les auteurs, pourriez vous préciser à quelle notion vous faites référence ?

Non, justement, la question était pour vous ;) je me demandais s'il fallait l'entendre au sens d'un philosophe particulier : d'Aristote, du néoplatonisme, de Kant etc etc.

Ce que vous entendez dans votre définition de "connaissance transformatrice" [gnose au sens que lui donne Corbin], à mon avis - fait rupture avec les traditions philosophiques "classiques" (mais je peux me tromper) et semble ouvrir plutôt la question des exercices spiritituels ? et, si on ose le mot d'une philosophie mystique (mes refs, pour ce qu'elles valent : Weil, Hadot, Corbin, Plotin.... voire Jacques Delord aussi !!!.... Je ne connais que de nom mais je crois aussi que des gens du coté de l'occultisme/ésotérisme comme Guénon se disent métaphysicien ? mais peut etre est-ce une autre définition du terme encore ?). Jung fait en effet figure d'auteur limite, à cheval entre psycho et philo.... (mais je ne connais pas suffisamment sa théorie pour faire la part des choses)

Je vous avoue que la philo de la magie pour ce qui nous intéresse tous, et d'une manière plus personnelle, la traduction concrète des métaphysiques est un sujet qui m'intéresse au plus haut point.

Concernant Burger: je cherche justement ses écrits (s'il y en a) purement philo, et son utilisation de ses références intellectuelles (Heidegger, Tillich, Marcel). Burger m'a semblé souvent assez "light" en philo (pas une critique de ma part, logique au vu du public...). Et j'aimerais voir où ça va quand il pousse la machine...  (il faudrait que je le relise en détail sur ces questions d'ailleurs, peut etre que je n'étais pas en capacité d'apprécier à l'époque...)

(cf. autre fil de discussion :

 )

tout ça est un peu en vrac, mais bon, j'espère que le propos reste compréhensible :)

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J’ai trouvé une excellente définition de l’objet d’étude de la métaphysique sous la plume de Bruno Bérard. C’est intéressant car cela complète ma définition d’hier en la précisant :

 

La physique étudie l’enchainement des causes et des effets. Par exemple la chaleur provient de la combustion, laquelle a besoin de l’oxygène produit par les plantes grâce à la photosynthèse du au soleil et à la chlorophylle, etc. L’enchainement des causes doit aboutir à une cause première.

(…)

L’objet des métaphysiques consiste dans les rapports entre cette cause première (le Créateur, l’Infini, la Réalité Ultime) et tous les autres.

 

Et donc : Lorsqu’on a épuisé les réponses nécessairement réductrices de la physique, de la biologie, des mathématiques, de la logique, de la psychologie, de la philosophie et même de… l’illusionnisme, il reste la métaphysique pour explorer les questions les plus essentielles de l’existence.

Le même Bruno Bérard (déjà cité) plus haut indique que  la métaphysique s’applique à toute les choses, de la pensée et de la vie

La métaphysique doit donc s’appliquer aussi à l’effet Barnum et à l’illusionnisme plus généralement… Mais ça pour le voir, il faut être à la fois un peu illusionniste et un peu métaphysicien. :)

En tout cas merci Azoth pour votre intervention, d’un coup je me sens moins seul dans mes questionnements (sur ce forum j’entends). :)

 

 

Modifié par Shiva

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Paul Binocle

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Il y a 10 heures, Azoth a dit :

Je vous avoue que la philo de la magie pour ce qui nous intéresse tous, et d'une manière plus personnelle, la traduction concrète des métaphysiques est un sujet qui m'intéresse au plus haut point.

Pour faire écho... Je crois qu'il n'y a pas d'autre sujet en illusionnisme qui m'intéresse plus que celui-la.

Hélas pour beaucoup de magiciens cela n'est même pas un sujet.

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Paul Binocle

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Pour moi la métaphysique concerne toutes les théories/hypothèses pour lesquels il est impossible d'imaginer/créer une expérience ou un évènement qui permettrait de répondre à la question sans ambiguïté, au contraire de la physique classique. 

Ta définition de la métaphysique correspond pour moi à la philosophie, même si de nos jours la philosophie est devenue juste l'inventaire des philosophes passés et de leur "philosophie" et non une réflexion sur la vie, l'univers et notre place dans celui ci.

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Il y a 1 heure, Alain I a dit :

Pour moi la métaphysique concerne toutes les théories/hypothèses pour lesquels il est impossible d'imaginer/créer une expérience ou un évènement qui permettrait de répondre à la question sans ambiguïté, au contraire de la physique classique.

Oui... Cette définition est aussi tout à fait valable.

Après, il existe aussi tout un pan de la métaphysique (orientale en particulier) qui est basée sur l'expérience de grands mystiques ou de grands méditants qui ont eu une vision de l'absolu.

Il s'agit d'une expérience intérieure en première personne. Elle ne re répond donc pas aux critères  des sciences dures mais il ne s'agit pas, pour autant, de pures hypothèses, extrapolations ou croyances.

Le jour où tu te rends compte que le monde n'existe pas, la vie devient plus simple.

Paul Binocle

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Le 26/02/2015 à 16:46, Shiva a dit :

Très bonne remarque nestor d ! :) (ce point est aussi très présent chez Herb Dewey (the king of cold readers) et ça m'avait pas mal marqué quand j'ai commencé à m'interesser au cold reading aussi)

Finalement si nous essayons de lister les explications de l’effet Barnum, on tombe sur des choses assez diverses.

(les explications que je donne ci-dessous ne sont pas exhaustives et, par ailleurs, elles peuvent tout à fait se compléter sans s’exclure les unes les autres. J’essaie simplement d’aborder un angle différent à chaque fois.)

Donc... L’effet Barnum fonctionne parce que :

Explication liée au spectateur

Le spectateur est naïf, il croit tout ce qu’on lui dit.

Le spectateur a envie de croire que la voyance ou la télépathie sont possibles.

Le spectateur se sent valorisé d’être lu et étudié « ainsi »

Explication liée au performer :

Le performer a du charisme. Il émane de lui une aura et une autorité qu’on n’a pas envie de contredire.

Explication liée au reading :

Les lines sont positives et ont tendance à valoriser l’ego du spectateur.

Les lines sont très vagues.

(cette dernière explication revient à une explication sur le plan de la linguistique : les mots sont une carte mais la carte n'est pas le territoire. Un mot peut tout à fait être ambigu et représenter plusieurs territoires.)

Explications liée à l’anthropologie :

Les êtres humains partagent un fond existentiel et émotionnel commun.

 

Explication liée à la psychologie :

Il y a un phénomène connu en psychologie sous le nom de recadrage . La PNL s’en est beaucoup emparé mais c’est quelque chose de très ancien. Le recadrage est une opération cognitive qui consiste à donner un autre sens à une expérience vécue, un message ou un signe que le sens initial. On peut parler, aussi, tout simplement, d’interprétation.

Explication vaste de type philosophique-métaphysique :

Il est dans la nature de l’esprit humain de projeter sa subjectivité sur le monde. Chaque phénomène, message ou signe, quel qu’il soit, est toujours interprété et appartient à la subjectivité de celui ou celle qui en fait l’expérience en première personne. Y compris le monde physique, cet arbre qui est là devant moi, par exemple, n’est jamais le même pour deux personnes différentes car chacun va le voir de son point de vue et coller sur lui des impressions, émotions, concepts ou souvenirs qui vont être différents pour chaque personne.

Cela donne des affirmations qu’on peut qualifier de « métaphysiques » et qu’on trouve chez plein d’auteurs depuis l’antiquité :

Nous ne voyons pas les choses comme elles sont, nous les voyons comme nous sommes.

Nous croyons être une multitude d’esprits différents dans un univers mais nous sommes, en fait, un Esprit qui projette une multitude d’univers (chaque interprétation, chaque vision du monde est un univers).

Le monde est une projection de l’esprit.

 

Je l’ignore mais… c’est une put*** de bonne question ! :)

Dans la mesure où il y a indéniablement une forme de conscience chez les animaux, une appréhension du réel et même de la communication (même si elle ne passe pas par le langage), il me semble que tous les éléments sont réunis pour concevoir que l’effet Barnum puisse exister aussi chez les animaux. Pas sous la forme de l’expérience de Forer, bien sûr, mais il y aurait certainement des expériences à imaginer autour de ça.

Ou bien on s'imagine ce que l'on est pas, les résumés sont assez flatteurs avec quelques points négatifs, que l'on laisse bien de côté tant le reste apparaît nous flatter surtout de la part d'une autorité scientifique et professorale.

J'appelle le syndrome Mr Jourdain.

 

Modifié par Invité
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