J'ai découvert la magie dans les années 80. Et j'ai arrêté dans les années 90, car je n'arrivait pas a en/y faire ce qui m'intéressais. Certes j'étais pas assez doué/persévérant en manipulation, mais surtout je ne me sentais pas les compétences pour jouer un rôle, ce qui me semblait indispensable. Enfin j'étais un peu seul et ne voyais guère dans le monde magique de choses se rapprochant de ce que je pouvais avoir envie d'y faire.
Christian Chelman dénotait un peu dans le paysage par son souci de la narration et de poser une ambiance. Mais l'univers ne me convenait pas (j'étais alors trop sceptico-zététicien pour être attiré par une revisitation de la magie noire).
J'avais bien vu et enregistré à la télé un spectacle très proche de ce qui m'attirais (mélangeant théâtre, magie et onirisme), mais je ne me sentais pas capable de faire pareil. J'en ai oublié le nom aujourd'hui (j'ai jeté la K7 il y a 10 ans environ avec mon lot de VHS). Dommage.
La question de la Magie nouvelle était déjà dans l'air dans ces années là, mais juste en filigrane. Le Nouveau cirque lui par contre était déjà là (avec le Cirque Plume notamment), qui prenait ses racines dans ses autres "nouveaux arts" qui étaient apparus précédemment : Nouveau roman, Nouveau cinéma (Nouvelle vague &co)…
Il s'agissait comme souvent dans une pratique artistique, de proposer de nouvelles expérimentations, de rompre aussi avec certaines formes du passé. Comme d'ailleurs Robert-Houdin l'a fait en son temps (avec effectivement sa Nouvelle magie blanche).
Et il faut faire la part des choses entre ce qui peut être d'une part une dimension marketing ou journalistique et d'autre part une vraie volonté d'innover et de faire mouvement. Il ne s'agit pas juste de "dépoussiérer" une discipline, mais bien d'inventer, de proposer, d'explorer de nouvelles approches.
Aujourd'hui, 30 ans après, la magie est devenue +visuelle, +rapide, +percutante, +élégante parfois, +électronique aussi. Et globalement je trouve qu'elle y a gagné. Mais elle reste pour beaucoup une magie de trucs, une magie de tours qui s'enchaînent, etc. Une magie-performance aussi.
Alors oui la Magie nouvelle, comme dit dans les messages précédents, ce peut être une magie sans magicien•ne, une magie interdisciplinaire, ce peut être quelque chose comme un spectacle magique (et pas juste une suite de tours). La magie n'y est plus substantif mais adjectif.
Je ne connaît pas les artistes qui aujourd'hui se revendiquent de la Magie nouvelle (mais du coup j'irais voir je pense). Mais je dirais que ce pourrait être une magie qui n'est pas un but, une fin en soi, mais un moyen de parvenir à autre chose. Qui se fout plutôt pas mal des techniques utilisées, mais va s'intéresser à l'effet (+illusionnisme que prestidigitation si l'on veut). Plus encore, qui va chercher au delà même de l'effet magique, ou du moins cherchera la "magie" bien ailleurs que dans ce qu'il est convenu d'appeler des tours. La psychologie, la mise en scène ne seront pas juste un truc en+ qui va venir améliorer une routine techniquement rôdée, mais sont la base de la construction de la scénographie. La magie —au sens technique du terme— se met au service de la scénographie et non le contraire.
En ce sens, Chelman ou Tamariz (+dans ses écrits que dans ses spectacles) ont été —parmi d'autres— des précurseurs. Fechner je ne sais pas, je le connais +par son travail autour de la magie (collectionneur, bibliophile…), qu'en tant que magicien.
Je ne sais pas trop pourquoi j'écris tout ça. Pour dire que ce n'est pas nouveau. Mais aussi, je pense, pour dire qu'il y a du bon dans tout ça. Que ça n'empêche nullement qu'une magie +classique continue. Pour dire que le terme "nouvelle magie" a un ancrage et des références historique (dans la lignée du nouveau cirque… ou oui de la "nouvelle cuisine" aujourd'hui). Pour dire aussi que c'est lié à l'histoire-même de la magie et que ça ne sort pas de nulle part : qu'il y a eu des précurseurs (même si ceux-ci ne s'en revendiquent pas aujourd'hui). Etc.
Bref la magie, nouvelle ou pas, est vaste, et on a pas fini de l'explorer. Surtout on a pas fini d'explorer ce qu'on peut faire avec.