Paru en 1991, Smoke and Mirrors de John BANNON est un de mes livres préférés. Ce livre regorge d’idées et de tours que je n’hésiterai pas à qualifier de sensationnels.
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C’est d’abord un bel objet (comme d’ailleurs tous les livres édités par KAUFMAN que j’ai pu voir ou lire).
Et c’est peut-être bête, mais j’aime bien quand un livre de magie est bien maquetté, bien illustré (Rendons à cet égard hommage au talent d’illustrateur de KAUFMAN), et qu’il reste ouvert sur la table pendant qu’on a le jeu en mains, sans qu’on soit obligé de bousiller le dos (certains éditeurs français pourraient peut-être en prendre de la graine…). Mais je m’égare. Passons au contenu.
Le livre contient 31 tours, répartis sur 164 pages. Ce qui fait une moyenne de 5,29 pages par tour. Ça c’est pour les amateurs de chiffres qui peuvent d’ailleurs arrêter leur lecture de cet article à la fin de ce paragraphe, vu qu’il n’y aura plus de chiffres jusqu’à la fin de l’article. Merci.
John BANNON est un grand copain de Simon ARONSON (qui signe la préface du bouquin dont je vous parle) et de David SOLOMON (qui ne signe rien du tout dans le bouquin, mais c’est un très bon copain quand-même). Ça, c’est pour les amateurs de potins. Qui vont d’ailleurs pouvoir, tout comme les amateurs de chiffres, arrêter bientôt leur lecture, vu qu’en ce qui concerne les potins sur John BANNON, je vais vite être sec.
Mais je digresse. Revenons au sujet.
La magie de John BANNON me fait un peu penser à celle de Paul HARRIS pour son sens de l’humour, son astuce et sa créativité, dans la présentation et la construction des tours. Attention, BANNON n’est pasPaul HARRIS. Si vous aimez les tours où la carte choisie apparaît au milieu d’un jambon-beurre qui sort magiquement de votre chaussure gauche, ce n’est pas chez BANNON que vous le trouverez (c’est plutôt chez Paul HARRIS). BANNON est donc beaucoup moins délirant queHARRIS (ce n’est pas une critique que je fais là, juste un constat. Mais, au fait, ça existe, ça, un magicien plus délirant que Paul HARRIS ?). Mais dans la présentation de leurs tours, je les trouve assez proches (références à des titres de films, utilisation de jeux de mots plutôt rigolos, personnification d’objets…). Bref, ceux qui connaissent l’un ou l’autre me comprendront peut-être. Pour les autres, laissez tomber et lisez plutôt la suite de l’article.
Le niveau technique n’est pas particulièrement élevé (entendez par là qu’on est pas chez MARLO où on finit souvent les routines avec un double noud à chaque doigt). Certains tours demandent malgré tout pas mal d’entraînement, la présentation et le timing jouant un rôle très important. Certains effets reposent quasi-entièrement sur la misdirection (Grand jeu de l’article : repérez le pléonasme dans le paragraphe précédent !).
Les routines sont très bien expliquées et BANNON cite systématiquement ses sources et inspirations. Ce qui fait de la lecture de ce bouquin un régal aussi bien pour le magicien que pour l’encyclopédiste qui sommeille peut-être en vous… L’amateur de potins, lui, va roupiller.
Voici un échantillon des merveilles qu’on peut trouver dans ce livre (vous ne croyez quand même pas que je vais tout vous raconter !) :
> Clock o’Doom
Un excellent tour de carte sur le thème de l’horloge et du temps et leur relation avec les cartes. Une carte choisie est retrouvée dans un petit paquet de cartes (12) et disparaît aussitôt. Elle réapparaît aussitôt retournée au milieu du jeu, sans qu’il y ait eu le moindre contact entre le petit paquet et le reste du jeu. Il n’y a pas d’empalmage, pas de lapping.
Il faut maîtriser le Bold face-up switch de MARLO, qui vaut le coup d’être travaillé. C’est très gros (bold comme on dit là-bas) mais ça passe vachement bien. BANNON propose aussi une autre méthode pour le cas où vous avez un problème d’angle… Il pense à tout ce BANNON !
> Shake Well Before Using
John BANNON se lance (et le lecteur aussi, du coup) dans un tour ” huile et eau “. Le jeu est éventaillé pour montrer que les couleurs (noires et rouges) sont séparées. Le jeu est ensuite mélangé. Un nouvel éventail révèle au spectateur ébaubi que les rouges et les noires sont toujours séparées. Le jeu est maintenant non pas mélangé, mais plutôt ” secoué ” (shaken donc, un peu comme on mélange un cocktail). Un nouvel éventail des cartes montre que cette fois ci, c’est bon, les rouges et les noires sont bien mélangées (!)…
” Shake well before using ” ou ” Et John BANNON inventa le faux-faux-mélange “. Fallait y penser…
> Fat City
Un effet de sandwich étonnant dans lequel le jeu entier se retrouve entre les deux cartes.
(Pour ceux qui aiment les gros sandwichs, donc).
> Trick Shot Production
Une carte choisie est perdue dans le jeu. Et elle est vraiment perdue vu que le(a) spectateur(rice) mélange lui (elle)-même le jeu, que le magicien ne le (la) connaissait pas forcément avant et qu’en tout cas, il ne lui a pas donné d’argent. Le magicien tente de deviner la carte puis la téléporte magiquement dans l’étui. Le magicien sort ensuite l’étui de sa poche et en fait sortir la carte choisie qui s’est transformée… en boule de billard !
(NB : ce tour ne bousille même pas l’étui, mais il faut noter quand même que la boule de billard, à force, ça peut déformer les poches de la veste !)
> Ace-Man Cometh
Nous avons là une routine de transformation de carte basée sur un jeu de mots intraduisible en français. Mais avec un peu d’imagination, on doit pouvoir l’adapter. Ça vaut le coup, je trouve. Avis aux amateurs… (et aux professionnels aussi, d’ailleurs !).
> Detour de force
Effet très fort où deux cartes de prédiction qui semblaient à côté de la plaque s’avèrent inopinément juste (vous me suivez, là ?). Un tour sans manipulation. Que du bluff. Et en plus c’est drôle !
> Directed Verdict
Le spectateur coupe aux quatre as. Une énième version de ce classique, mais c’est une des plus faciles à exécuter que je connaisse (pour info, j’ai déjà lu des versions de Ken KRENZEL, Bruce CERVON, et il me semble avoir vu quelque part une version de JENNINGS ou de MARLO (?) ).
> Creased Lightning Again
Ou la méthode ultime (selon son auteur) pour plier une carte. Cette méthode est en fait le prolongement de celle que BANNON avait présentée dans Impossibilia (que je n’ai pas lu), mais qui présentait encore – semble-t-il -des défauts. Celle-ci serait donc “béton”. N’étant pas moi-même un grand plieur de cartes, je laisserai donc les pros juger. Mais à quoi ça peut bien servir de plier une carte, au fait ?
> Vicious Rumors
Encore un effet à énervement, pardon, émerveillement de spectateur. Les quatre dames sont glissées entre l’index et le majeur d’un(e) spectateur(rice). Une carte est ensuite choisie et perdue dans le jeu. En procédant par élimination, le magicien va enlever les dames une à une d’entre les doigts du (de la) spectateur(rice). Et devinez un peu quelle est la carte qui lui reste ? Entre ses doigts ? Au (à la) spectateur(rice) ? Hein ?
> Timely Departure
Le dernier tour du livre est (encore) un effet très fort. Il tourne encore autour du thème de l’horloge et du temps… Trois cartes sont choisies pas trois spectateurs différents. Les cartes sont bien évidemment perdues. Elles disparaissent du jeu – Et ça c’est sûr, puisque toutes les cartes du jeu sont montrées faces en l’air -, pour finalement réapparaître retournées dans ce même jeu, peu après.
Ou ” Comment remonter son jeu comme on remonte une montre ” (et ça marche, j’ai essayé !)
Sur les 31 routines décrites dans ce livres, plus des 2/3 sont faisables. Bon, bien sûr, pas mal de ces routines nécessitent d’être assis à une table, mais ça peut arriver, non ? de s’asseoir à une table quand on fait de la magie…
Pour me résumer : je vous recommande chaudement la lecture de ce livre.
Addenda : les magiciens cités en référence dans le livre (techniques, ou inspiration de tours…)
David Acer, Simon Aronson, Arturo Ascanio, Tom Bachellor, John Benzais, Ross Bertram, Moshe Botwinick, Fred Braué, John Cornelius, Bruce Elliot, Tom Ellis, Alex Elmsley, Bob Farmer, Karl Fulves, Frank Garcia, Dan Garrett, Daryl, Connie Hadden, Bro. John Hamman, Paul Harris, Jean Hugard, J.K. Hartman, Richard Himber, Rick Johnson, Charles Jordan, Eddie Joseph, Peter Kane, Tony Kardyro, Bob Kohler, Al Koran, Seth Kramer, Gary Kurtz, Harry Levine, Harry Lorayne, Sid Lorraine, Ed Marlo, George Miller, Tom Onosaka, Darwin Ortiz, Richard Osterland, Gary Ouellet, Harry Riser, Harvey Rosenthal, David Roth, Jay Sankey, Slydini, David Solomon, John Thompson, Dai Vernon, Randy Wakeman, Larry West, Ron Wilson, Tommy Wonder, Scotty York.
Merci à Bruno SANVOISIN pour la relecture.
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