7 janvier 2002
La machine à remonter le temps…
Que le temps passe vite, je suis déjà Américain depuis 2 semaines mais je parle toujours le français…
Retrouvailles avec Daniel CROSS, un rayon de soleil dans ce monde de brutes.
Ca fait quinze ans que je ne l’ai pas vu, et ça fait peur… Rencontre joyeuse, ouf, il est resté le même ; lui aussi, il se plaint que les gens sont devenus trop sérieux. Cela fait bien 30 ans qu’il vit à Las Vegas.
Ancien serveur du Lido, parti pour les “States” avec une danseuse.
Sur un coup de tête, un coup d’amour ou un coup de bite, va savoir…
Mais une fois les feux de l’amour éteints, il reste quand même sur place et devient barman, apprend le close-up, devient barmen-magicien-close-up au “Desert-Inn”, puis magicien attitré du “Desert-Inn”.
Quand l’hôtel ferme dans les années 70 pendant deux ans pour “travaux”, ils le gardent sur leur “payroll” (fiche de paie), et par la suite il leur reste fidèle jusqu’au dernier souffle. Le Desert-Inn n’existe plus, mais Daniel oui !
Certes, les grands joueurs qui l’engageaient pour une fortune dans leurs suites se font de plus en plus rares, ce sont maintenant les entreprises, les corporations, les comptables et les boites événementielles qui règnent sur tout.
Il travaille avec environ 15 agences à raison de 4 à 5 galas par semaine. Quand je pense que le “Desert-Inn” l’a gardé pendant ces deux ans de travaux, je fais une flaque d’admiration pour les gens de l’époque…
J’ai vu – enfin – Lance BURTON !
En 83 c’était une “attraction” comme moi.
J’ai tenu 1 an au HILTON, lui 9 ans (!) au TROPICANA ; tous les jours, l’été comme l’hiver, automne et printemps, 2 fois par jour. Sans relâche.
Puis 5 ans avec un spectacle complet au HACIENDA.
Vint Peter REVEEN, un autre vieux copain de l’époque, pour devenir son imprésario.
Ce mec est hypnotiseur, magicien, également père de 4 enfants adultes, plusieurs fois grand-papa et maintenant “personnel manager” de Lance.
Il n’a pas travaillé dans la dentelle : un contrat de 13 ans dans un hôtel qui n’existait pas encore, avec un théâtre pour Lance et selon ses désirs : le LANCE-BURTON-THEATRE. Bon travail ma fille !
Partout, mais vraiment partout à Las Vegas on voit deux pubs : “MASTER MAGICIAN” Lance BURTON et SIEGFRIED & ROY “MAGICIENS OF THE CENTURY”, pas à confondre avec Jésus Christ, magicien du millénaire…
Beaucoup de choses ont été dit sur le show de Lance BURTON, classique certes, mais infiniment subtil et volontairement naïf. N’importe qui à sa place serait ridicule, lui non, car c’est sincère.
Il nous montre un monde ou tout est encore gentil, simple, merveilleux et généreux.
Son show me rappelle le film “la flûte enchantée” d’Ingmar BERGMAN (1972) qui se servait diaboliquement de la simplicité et de l’artifice en papier-carton au service de l’opéra.
Chez BERGMAN c’est Mozart, chez Lance c’est la Magie qui devient merveilleux, justement à cause de cet univers volontairement kitsch à la Chantal Goya.
Est ce n’est pas du tout péjoratif quand je dis ça. Ce que le spectateur profane ne sait pas.
Chez Lance BURTON la magie dit classique est un CHOIX et pas une nécessité par défaut.
Je ne suis pas historien en magie, mais il parait que Harry KELLER, retraité depuis 1908, et à ma connaissance dans un état plutôt lamentable, a choisi Howard THURSTON comme successeur.
Quand ce brave THURSTON (décédé en 36) commençait à se sentir un peu mal, il choisit DANTE comme successeur.
Lui – qui se retire vers la fin des années 40 – attend 5 ans pour tomber sur un mec nommé Lee GRABEL comme “successeur”.
Ce fameux GRABEL doit être un sacré paresseux : il prend sa retraite en 1959, se la coule douce, et donne en 1996, après avoir attendu presque 40 ans, qua-ran-te ans (!) la bénédiction à Lance BURTON de continuer la tradition des grandes “classiques” : Dante, Blackstone, et Kalanag.
Voilà la vérité, la vérité, rien que la vérité !
Lance commence son spectacle avec son numéro de colombes – mieux que jamais – mais il parle pendant. C’est assez touchant, et c’est un des rares shows humaines dans cette ville plein d’artifices.
Les hôtels
Je les ai vu grosso modo…. Mon vieux HILTON – à l’époque le plus grand – fait carrément “Pigalle” comparé aux nouveaux palaces, toujours plus grands, plus luxueux, plus chers.
Le VENETIEN est tellement riche et soigné que ça devient vulgaire, le BELLACHIO est trop beau pour être honnête, par contre le PARIS est génial.
A l’intérieur on se sent presque bien, comme à Paris un soir de printemps. Plafond avec ciel et nuages très très bien fait, aucun faute de goût, pour moi une réussite ! Cocorico !
Et tout se mélange : Le MGM a achèté à 80 pourcent le MIRAGE qui a 20 pourcent sur le VENETIEN qui fait peut être partie à 50 pourcent du groupe GOLDEN NUGGET et etc.
Si on se fait virer d’un, on ne peut même plus aller chez la concurrence, tout ça c’est assez opaque…
J’ai aussi vu Mac KING, un magicien qui travaille sans tigres, sans illusions, sans lasers, sans assistants et presque sans accessoires. Tout seul comme un grand.
Tous les après midis, 13h et 15 heures au HARRAS dans une salle d’environ 300 places. Il parle, fait des tours des cartes, des cordes, crache un poisson rouge; le public – c’était plein – rigole à fond, et son contrat est prolonge jusqu’en 2006.
Les incorruptibles du LAS VEGAS REVIEW-JOURNAL lui ont donné la note “A”, comme à Siegfried & Roy, les autres spectacles de magie varient entre “B-plus” et “C-minus”…
Je prévois déjà une flopée de magiciens qui vont s’acheter le “jeu invisible”, 3 faux pouces et qui ne vont pas comprendre, pourquoi “lui” et pas eux…
Comme ceux de l’époque des fauves qui se sont achetés il y a 30 ans des tigres, lions, éléphants et d’autres compagnons. Peu ont survécu à la famine…
Cher journal, faut que je te laisse, car il y a des faux pouces et des “jeux invisibles” en solde chez mon marchand de trucs.
A la prochaine !
Merci à Bruno SANVOISIN pour la relecture.
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