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Chacun de nous en a déjà fait l’expérience : mettre sur pied une organisation, un festival, un spectacle demande de plus en plus d’énergies et de moyens, notamment financiers, mais renouveler fidèlement d’année en année un tel rendez-vous et y tenir mordicus, relève d’une compétente opiniâtreté qui mérite un immense coup de chapeau.
Depuis 1991, le toujours jeune Luc Parson et les responsables touristiques et municipaux de quatre petites communes de la Vallée de l’Eau d’Olle, à quelques 50 kilomètres de Grenoble, ont tenu ce pari de proposer une semaine de spectacles quotidiens et d’animations magiques.
Des grands noms de la magie se sont arrêtés dans ces montagnes de l’Oisans, du regretté Garcimore à Xavier Mortimer, en passant par Peter Marvey, Dani Lary, Norbert Ferré, Jean Merlin, Dominique Webb, David Stone, Julien Labigne, Gérard Majax, Gianni Henderson, Fred Roby, Jérôme Helfenstein, François Normag, Alpha, Hugues Protat, Olivier Lejeune, Les Gilsons, Sylvain Mirouf et tant d’autres. Et le concours des « Etoiles de la Magie » a permis à pas mal de jeunes artistes de scène et de close-up, de poursuivre leur ascension vers le succès.
Mais -et il faut savoir le reconnaître- ce n’est pas chose aisée de trouver à chaque fois et suivant les limites d’un budget qui n’augmente pas, des spectacles et des numéros qui soient « au top ». Nous en avons encore fait l’expérience cette année, d’autant plus que, vu les pénibles conditions climatiques de cet été, le public, composé pour une bonne part de touristes, a été, dans l’ensemble, moins nombreux et moins assidu. Dommage, car plusieurs soirées se sont révélées de toute grande qualité.
Ce fut le cas pour le gala de clôture où, dans le grand hall d’Allemont, un Gaëtan Bloom comme toujours en toute grande forme dans chacune de ses interventions, a présenté des artistes aussi brillants les uns que les autres : Juan Mayoral dans son « act » primé à la FISM, sa charmante compagne, la délicieuse chinoise Huang Zheng, Jeton, un jongleur vu chez Sébastien et les Magic Wave venus de Berlin où ils triomphent depuis des mois au « Winter Garden Music-Hall ».
Standing ovation et une tonne de papiers multicolores propulsés en l’air, comme autant d’étoiles pour fêter ces 15 ans du Festival. Un autre grand nom figurait au programme de cette édition, Finn Jon. Dans la petite salle de Villars-Reculas, il nous a fait et refait ses numéros de bulles de savon, de fumée et d’apparitions de balles de tennis, en y ajoutant l’une ou l’autre routine de cartes, manière de « tenir » au moins une bonne demi-heure.
Malheureusement – comme d’ailleurs chacun d’entre nous – Finn Jon vieillit et il est dommage qu’un si grand artiste, dont l’élégance et la classe sont par ailleurs demeurées intactes, accepte encore de se produire alors que sa technique si reconnue et réputée, s’étiole quelque peu et amène ainsi des « ratés » dont le public profane n’est pas dupe…
Avec Finn Jon, se produisait aussi ce soir-là, celui qui fut durant de nombreuses années le magicien attitré de « Fort Boyard », Hervé Listeur. Un numéro plaisant, très commercial où l’interactivité avec le public fait mouche à chaque coup. Hervé Listeur faisait aussi partie du bon gala d’ouverture du Festival, où le public de Vaujany put aussi applaudir un remarquable numéro de main à main présenté par le trio Helios, de même que Patrice Curt, le conteur au chapeau de Tabarin et, en vedette à la fois local (il habite Grenoble) et surtout de plus en plus international (il revenait de Las Vegas où il a reçu le « Golden Award » et partait le lendemain au Japon), le sympathique Pilou, dont le numéro s’est encore fameusement amélioré depuis son succès à Stockholm.
Présentateur talentueux de ce spectacle d’ouverture, le merveilleux Jean Régil, toujours présent dans la Vallée de l’Eau d’Olle, avec son épouse et sa famille. Que voilà un artiste dans tous les sens du mot : généreux, gentil, compétent, cultivé, passionnant et passionné par son métier, un artiste trop peu connu et reconnu par la jeune génération, tant ses prestations (je retiendrai notamment la présentation plus que bluffante – surtout pour les magiciens ! – de la vitre transpercée) sont un régal. Ce fut encore le cas lorsqu’il proposa au sommet du Pic Blanc, à 3300 mètres d’altitude, une superbe lévitation d’une conception nouvelle et très étonnante.
Certes, « le tour de magie le plus haut du monde » lui a donné durant les jours précédents des sueurs froides, mais – une fois de plus – Jean Régil a gagné le pari ! Bravo ! Etaient là aussi pour faire le spectacle : Benji, Adam Hellinski et Alain Slim.
Redescendons vers la plaine et signalons les autres spectacles du soir : une soirée « italienne » animée par Leo Nifosi et Nicole, Zapotek et Partner, Maximilian et Lisa, et orchestrée par le magicien bien connu Mr Smith, l’étonnant show de la Compagnie Jordi Bertran, créatrice du « petit bonhomme en mousse», popularisé par la chanson de Patrick Sébastien, et la soirée « jeune public » où Patrice Curt a su recréer l’ambiance du conte de « La petite fille aux allumettes ».
Il ne faudrait sûrement pas oublier la soirée du concours des « Etoiles de la Magie » qui a vu s’affronter en toute convivialité cinq jeunes artistes. Le Joker Dandy, de son vrai nom, Andy Verhaegue, dans un numéro peu convaincant qu’il devra absolument retravailler de fond en comble, Pierre Xamin dans une véritable comédie mettant en scène un baby-sitter aux prises avec un bébé pleureur (numéro où foisonnent les idées et les trouvailles), Benji et ses grandes illusions, certes classiques mais présentées avec beaucoup de rythme et une bonne mise en scène, la toute jeune Elfia, superbe dans un « act » quasiment champêtre et bucolique où feuilles, fleurs, oiseaux apparaissent et se multiplient, et enfin, remplaçant au pied levé un candidat absent, Jim Breize, qui, habillé en écolier d’après-guerre, réalise avec espièglerie quelques effets magiques malheureusement pas toujours très précis et efficaces.
Après une longue délibération durant laquelle le public put assister au show de Henri Giraud, troublant et merveilleux sosie du regretté Coluche, le jury, présidé par Patrick Hourdequin, annonça les résultats : une Etoile de bronze pour le Joker Dandy, pour Jim Breize et pour Pierre Xamin, une Etoile d’Argent pour Benji, et l’Etoile d’Or pour Elfia qui reçut aussi le prix remis par le jury des enfants, encadrés par David Coven.
Dans la catégorie « close-up », les magiciens se produisant chaque soir dans des restaurants des quatre villages participants, l’Etoile d’Or revient de justesse à Andy Verhaegue, beaucoup plus à l’aise en close-up qu’en scène. Bravo à tous ces lauréats dont le nom est à jamais associé à une vraie étoile dans le vrai ciel, ainsi qu’en témoigne la magnifique photo qu’ils ont reçue en cadeau, en plus d’un séjour d’une semaine à la montagne.
Outre ces spectacles, des animations ont eu lieu tous les jours : ateliers de l’enchanteur dirigés par Luc Parson, Jérôme Helfenstein et David Coven, stages de magie (un seul apprenti cette année !), apéritifs magiques dans les bars, grand rallye magique à Oz-en-Oisans en collaboration avec le Parc Disney qui fête aussi cette année ses 15 ans d’existence et les désormais incontournables rendez-vous du Cercle Magique suscités par le trio belge, André Mony, Olivier Prestant et Alain Slim. Un lieu de grande convivialité où les magiciens de tous âges (professionnels, amateurs ou débutants) mais aussi tout le public passionné, se retrouvent durant une bonne heure pour « se faire des tours » en toute liberté, et pour ensuite et uniquement pour les initiés, s’échanger explications, routines et suggestions.
Beaucoup d’habitués, fidèles du Festival, y reviennent et ce n’est certes pas la moindre qualité de cette semaine en Isère, que de permettre moult rencontres et discussions, autour d’un… tour ou… d’un bon verre. Les soirées d’après-spectacle deviennent souvent des nuits qui ne s’arrêtent pour certains qu’au lever du soleil… Même Arturo Brachetti, venu en toute simplicité à la fin du Festival « parce qu’il s’ennuyait chez lui à Turin », ne le démentira pas !
Enfin, en lien avec ce souci de renouveler un peu ce Festival –et ce sera encore bien nécessaire à l’avenir, sous peine de le voir s’étioler – Jean-François Durand et Florence Vassalo, les responsables quasiment infatigables de « La Maison de l’Eau d’Olle », co-organisateurs de celui-ci, avaient imaginé de réserver cette année, une soirée à un concours d’improvisations magiques.L’idée n’est pas neuve, et ce n’est certes pas Gérard Majax, promoteur avec Audouin Rambaud et Gérald Mainart d’une telle joute à « La Colombe d’Or », qui me contestera.
Mais reprendre un tel concept et le proposer devant un public de profanes, était sans doute risqué et n’offrait pas dès le départ toutes les chances de réussite. Soyons francs : si la salle ne fut remplie qu’à moitié, la soirée fut bien meilleure que beaucoup ne le craignaient, et finalement, sept équipes s’affrontèrent pour tenter de remporter, outre un séjour d’une semaine en montagne, le « Dahu d’Or ».
C’est le team composé d’André Mony, d’Adam Hellinski et de Candide (Jérôme Bourgeon), un jeune, talentueux et sympathique magicien français qui a triomphé lors du dernier congrès de Blackpool, qui s’est vu, aux applaudissements du public, décerner le prix. Il faudra sûrement revoir le concept et les conditions de celui-ci pour l’an prochain, mais vous le savez comme moi, « qui ne tente rien, n’a rien et ne change rien » !
Si vous le pouvez, bloquez déjà les jours d’août 2008. Et sachez-le : venir au Festival de l’Eau d’Olle, c’est nécessairement y revenir. On est si bien entre magiciens en vacances sur la montagne.
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Merci à Michel FONTAINE pour la relecture et Philippe COMTE pour la mise en page.
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