|
Le Magazine MAGIC, lancé en septembre 1991, avait il y a trois ans célébré avec éclat son 10ème anniversaire. Il s’était agi d’un congrès, sans que le mot soit jamais prononcé et qui comportait de nombreuses innovations.
Les sessions, autrement dit la suite de conférences ou démonstrations magiques, alternaient les techniques ou procédés purement magiques, et des exposés plus théoriques, mais du plus grand intérêt, concernant soit le côté commercial, la promotion de nos propres prestations, ou l’histoire de notre art avec la présence de diverses personnalités du monde magique.
Les notes de conférence, dont le prix était inclus dans l’inscription au congrès, étaient distribuées systématiquement à tout le monde à la sortie de la salle.
Sans doute encouragés par le succès de cette première édition, et après les nombreux commentaires favorables qu’elle avait suscitée, les responsables de MAGIC ont décidé de réitérer cet évènement qui, au départ, se voulait exceptionnel.
Stan Allen, passé du rôle de Directeur de publication à celui de Responsable du groupe (qui publie aussi un magazine consacré au jonglage) et John Moehring, nouveau Directeur, ont donc proposé un nouvel évènement du même calibre, et qui reprenait les mêmes excellentes recettes.
Le jour consacré à l’accueil, après la remise des tickets et des cadeaux traditionnels (un classeur destiné à recevoir les notes qui seront distribuées aux participants à l’entrée et à la fin de chaque conférence, et un imposant sac de voyage) le congrès propose aussi que chacun se fasse photographier pour que sa propre image, en forme de couverture du magazine, serve de badge-laissez passer aux différents évènements. Cette idée, reprise de la première édition, avait eu un grand succès.
Chacun a rêvé, trois jours durant, d’être la vedette du célèbre magazine ! Le même soir reprise également, au cours d’une soirée de détente en musique, d’une excellente idée. Chaque participant se voit remettre une enveloppe comportant 12 reproductions des couvertures passées de MAGIC, mais ce sont 12 cartes identiques. A lui de faire connaissance avec ses voisins pour échanger la carte qui viendra compléter sa propre collection.
Les choses sérieuses vont se succéder pendant les trois jours suivants. Conférences techniques avec, entre autres, Levent, un très habile manipulateur qui évoque la figure de Roy Benson.
Projection d’une vidéo de manipulation de boules et de cigarettes de ce dernier et démonstration par Levent des subtilités de la routine de Roy Benson.
Il va bientôt publier un livre consacré à la carrière et à l’explication des tours de celui-ci. Les notes comportent le détail d’une routine de boules et de nombreuses photos.
Joshua Jay est un jeune et très brillant magicien (il n’a que 22 ans) qui participe régulièrement depuis trois ans à la rédaction de MAGIC. Il montre plusieurs routines de cartes de sa création, ou arrangées par lui.
Greg Wilson (l’autre, pas le fils de Mark !) exécute également des routines de cartes, ainsi que Raj Madhok qui montre aussi un joli passage d’une bague à travers un cordonnet.
Encore profusion de détails d’exécution et de photos dans les notes distribuées. Michael Weber fait appel à un ordinateur pour une étrange prédiction du siège sur lequel un spectateur va s’asseoir, et, grâce encore à l’ordinateur, il crée une bande adhésive pour clore ses paquets de cartes Bicycle, à la place du cachet original. Mais une ligne de ce nouveau scellé lui indique la nature du jeu truqué contenu dans l’étui.
Le jour suivant c’est Kevin James qui vient parler de son numéro d’homme coupé en deux, vu la veille au gala, et de sa vie avec l’infirme qui est son assistant pour la circonstance.
Greg Frewin, vu également la veille dans son numéro de colombes, donne des conseils pour simplifier la technique de ce genre de numéro et réduire les prises. Actuellement, il n’a plus que deux colombes sur lui.
David Kaye spécialiste des séances pour enfants partage son expérience dans ce domaine.
Chris Kenner enfin, technicien et conseiller des spectacles de David Copperfield, donne la manière de rechercher la nouveauté et la créativité.
Un autre spécialiste Jim Sisti fait part de son expérience de magicien de restaurant, et la manière de se faire accepter de la Direction d’abord, puis des clients.
Don Wayne créateur d’illusions de scène donne les lignes à suivre pour réussir dans ce domaine difficile.
Charlie Frye brillant jongleur et magicien donne d’abord une éblouissante démonstration de son art de jongleur.
Puis il nous montre un certain nombre de combinaisons d’effets magiques et de jonglage, d’un niveau technique abordable : un canif change de couleur après avoir virevolté dans sa main, un éventail de cartes est produit d’un chapeau qui vient de sauter dans l’espace un billet se change instantanément en pièce de un dollar etc.
Jeff McBride, conjointement à la présentation de son numéro de masques, mime et manipulation de cartes à travers le monde anime une école de magie à Las Vegas.
Son propos au cours de ce congrès était de montrer une série de manipulations relativement faciles (chasse aux cartes, avec une seule carte au dos de la main, pluie d’argent simplifiée, production d’éventails de cartes géantes pris… sur la table).
Martin Nash, “the Charming Cheat” célèbre pour sa virtuosité aux cartes, est venu démontrer l’une de ses routines pour une manière “impossible” de retrouver une carte.
En plus de cette succession de trucs ou de manipulations de haut niveau le congrès faisait une large place aux à-côtés, indispensables au magicien professionnel : la promotion, la publicité et les moyens de communication.
Ryan Oakes est venu faire l’éloge de l’usage d’Internet dans la magie (dont les lecteurs de Virtualmagie sont bien entendu persuadés) Pour contacter des collègues magiciens à travers le monde bien sûr. Mais aussi pour assurer sa propre promotion au moyen d’un site Web bien pensé. Sa conception, la manière de l’organiser, le faire connaître etc.
Rick Gerber, magicien attitré des évènements des bières Budweiser, conseille sur ce qu’il pense être la voie pour un magicien d’entreprises.
David Sandy vient exposer la manière de proposer une publicité plus traditionnelle, au moyen de courriers publicitaires ciblés sur les décideurs.
Michael Diliberto, professionnel de la publicité et de la communication analyse enfin ce que doit représenter la publicité d’une entreprise ou d’un magicien. Il oppose des pages d’annonces de marchands extraites de MAGIC. La profusion de produits proposés empêche de rien voir.
La page publicitaire de Penn et Teller dans un magazine de spectacles retient l’attention avec une simple photo et quelques mots. Il montre aussi comment augmenter l’impact d’une photo portrait traditionnelle par un cadrage ou une inclinaison judicieux.
Le leitmotiv de la plupart de ces spécialistes de la communication : Soyez différent et surtout soyez le spécialiste de quelque chose. Vos clients éventuels ne feront pas confiance au bon en tout.
Mike Close occupe une place particulière dans la rédaction de MAGIC : Il assure la critique des livres, vidéos ou DVD, et tours qui sont soumis au magazine pour critique. Lourde tâche, dont il se tire fort bien grâce à sa grande compétence de magicien de close-up et à son impartialité.
Il dresse l’inventaire de ce que pourrait être la bibliothèque idéale du jeune magicien qu’il met en garde, comme nous l’avons fait maintes fois dans ces colonnes, contre la foultitude de “créations” et de “nouveautés” qui ne font que compiler des effets ou des techniques classiques.
Il fait aussi le parallèle entre l’étude par l’écrit, qu’il trouve préférable la plupart du temps, et la vidéo qui permet surtout d’étudier le rythme et l’effet de l’ensemble d’une présentation.
Il revenait entre autres à David Charvet de contribuer à la partie historique, avec une évocation du personnage d’Alexander “the man who knows” – l’homme qui sait. Outre son art de télépathie Il s’était fait une spécialité de faire apparaître l’image d’un visage sur une toile préalablement examinée par le public. Ce que David Charvet a présenté au cours de son exposé.
Comme il y a trois ans Bill McIlhany a proposé des extraits de films anciens et rares traitant de la magie. Malheureusement ces projections, quelque soit leur intérêt souffrent d’une image souvent floue ou sautillante, ce qui n’est pas favorable pour soutenir l’attention des spectateurs tard le soir…
Un autre point fort de ce congrès était la présence de plusieurs professionnels de haut niveau. Mac King qui assure l’après-midi le spectacle du Harrah’s, recevait Penn et Teller, vedettes du Rio. Point n’est besoin de les forcer à parler.
Le duo, dont Teller n’est pas muet dans cette circonstance, ne se fait pas prier pour donner les détails des aventures vécues au cours de leur carrière de trente ans.
Marvyn Roy, était venu quant à lui évoquer sa carrière de “Monsieur Electric” depuis plus d’un demi siècle, auprès de son épouse Carol.
Mike Caveney, qui était son hôte, n’a pas eu non plus grand mal pour le faire dérouler le film de sa vie. Son mot final : soyez vous-même, soyez différent, et surtout considérez et faites considérer la magie comme quelque chose de beau et de grand. Par votre vêtement et votre attitude autant que par vos tours ! Que le Dieu de la Magie l’entende !
Le close-up n’était pas absent des spectacles proposés. Nouvelle innovation : les spectateurs, répartis en groupes d’une cinquantaine étaient invités à entrer dans une salle, installée comme un bar. On pouvait d’ailleurs y commander des boissons.
Quelques exercices de jonglage exécutés par une charmante barmaid qui jongle avec des shakers des gobelets ou des bouteilles, avant de rattraper les uns empilés dans les autres.
C’est ensuite le barman, Eric Mead, qui propose quelques effets de passages de pièces et de matrix, au bar justement. Le public est invité à passer dans la pièce suivante, une salle aménagée en cabaret avec chaises et nappes.
C’est Mike Close qui joue son propre personnage en se présentant aux tables “Je suis le magicien de la maison, aimeriez-vous voir un tour ? ” Deux effets de cartes retrouvées de façon impossible au moyen d’un carré de plastique qui se retrouve dans le jeu à l’endroit précis de la carte qui vient d’être nommée.
Le groupe change encore de salle pour entrer dans une autre disposée de manière plus conventionnelle en amphithéâtre. Numéros de pièces qui se tordent sous les yeux des spectateurs, et transpositions présentés par Shoot Ogawa, et nouveaux tours de cartes montrés par Armando Lucero.
Deux galas de scène dans la très jolie salle de spectacles de l’Orleans ont permis d’applaudir entre autres : Anthony Gatto, un extraordinaire jongleur qui ne manipule que des objets classiques : des balles, des massues ou des cercles. Mais leur nombre 3, 5, ou 7 ne parvient pas à ralentir son rythme effréné, ni réduire son apparente facilité.
Kevin James revient avec sa maintenant classique boule de bowling qui s’échappe d’un dessin pour se matérialiser en tombant lourdement sur la scène. Puis son impressionnant numéro de l’homme coupé en deux. Et dire que ce n’est pas truqué !
Levent, vu précédemment en conférence, vient montrer un mélange de comédie et de magie. Greg Frewin dans son numéro de colombes bien connu, avec apparition finale de sa partenaire.
Rick Thomas présente deux illusions de son spectacle du Tropicana : la lévitation, façon Ashra de sa partenaire couverte d’un voile. Et disparition de celle-ci après que Rick se soit lui-même élevé dans l’espace pour retirer le voile qui la recouvrait.
Très original dialogue entre un magicien, Tony Chapek, et un autre lui-même dans l’écran d’un poste TV. Il passe bien sûr à l’hôte de l’écran les objets qu’il a dans les mains. Celui-ci ne manque pas de rouvrir le poste avec la télécommande quand l’homme en chair et en os vient de l’éteindre.
C’est enfin Norm Nielsen qui est chargé de conclure cette soirée avec son brillant numéro de cartes, pièces et son violon volant. Mais un plus ce soir : Norm venait d’accompagner au piano une chanson dédiée à la magie (c’est du moins ce qui a été annoncé en public, rectification le lendemain, le vrai pianiste était Mike Close).
C’est donc ensuite que le rideau s’est ouvert sur Norm Nielsen, jouant du piano, avant de tenter de le rattraper dans un surprenant numéro de piano zombie, voltigeant dans l’espace.
Enchaînement tout naturel avec son numéro bien connu, très applaudi en final de ce gala.
Le second gala de scène nous a valu le plaisir de revoir James Dimmare dans son superbe numéro de colombes. Tout y est réglé au millimètre de ses poses de mannequin de mode 1925 aux cheveux gominés, au moindre de ses gestes.
Sa partenaire le seconde efficacement. Et toujours son final avec la cage aux colombes dont la taille diminue sous le voile, pour devenir la petite cage éclipsée à vue.
Les illusions sont aussi brillamment représentées par Mark Kalin et Jinger. Présentation dans une ambiance clair-obscur d’une sorte de maison de poupée dans laquelle entre un mannequin épouvantail. Il y disparaît pour être remplacé, l’instant d’après, par Jinger, plus séduisante que jamais.
Kalin présente ensuite une version moderne de la femme sciée de Selbit. Sa partenaire est enfermée dans une caisse qui la recouvre complètement, ses chevilles attachées à une corde tenue par des spectateurs d’un côté de la scène, son cou attaché à une autre corde que tiennent d’autres spectateurs.
Passage des lames qui séparent les deux côtés de la boîte, écartés ensuite. L’effet est rendu saisissant par la quasi instantanéité de l’effet, après que le public ait vu la partenaire bien entière !
Tina Lennert montre le joli numéro que nous avions vu à Eindhoven : une suite de passes avec une écharpe et un anneau qui n’en finissent pas de s’entrelacer. La grâce de Tina ajoute beaucoup au numéro. C’est finalement un lapin qui apparaît dans les plis du foulard.
C’est ensuite Ronn Lucas, magnifique ventriloque qui se produit l’après-midi au Rio. Sa technique est parfaite et ses dialogues soit avec un mannequin grotesque ou des spectateurs qui jouent le rôle de marionnette font un très grand succès.
C’est enfin Mark Kalin qui revient clore la soirée avec sa routine de boules de billard géantes.
Comme j’ai tenté de vous en rendre compte il y avait beaucoup de magie et beaucoup de tout ce qui va autour de la magie dans ces quatre jours.
Vous devez sinon en sortir meilleur, du moins le penser. J’ai envie de conclure, comme le naïf d’une série de pubs de Holiday Inn, en ce moment à la télé, qui montre un groupe de spécialistes dans différentes branches d’activités “Je ne connais rien de tout ça, mais j’ai passé la soirée à Holiday Inn !”
>>> Réagissez à cet article sur le forum (merci de mettre comme sujet “[CR] 13e Magic Live”) !
Abonne-toi !
Chaque semaine, je partage tous les bons plans et actualités sur l'univers de la magie et du mentalisme.Rejoins les 16 761 magiciens déjà abonnés.