Avoir un objectif
La conscience d’un objectif donne l’intention, le vouloir, la motivation. En ce qui me concerne, je souhaite vivre de ma passion qui est la magie, avoir du plaisir avec un public, faire rire et mystifier. Avant tout, je fais de la magie pour moi et pour mon plaisir.
Pour d’autres magiciens, un objectif sera de faire de l’argent avec la magie, de gagner des concours ou d’être une vedette. Bien que différents, ces objectifs sont sources de motivation et d’action.
Quel que soit l’objectif visé, essayons de prendre des moyens habiles et efficaces.
Exemple vécu : Je souhaite passer à la télévision alors qu’un magicien a déjà sa propre émission. Pour ne pas répéter ce qui existe déjà, les autres chaînes ne veulent pas engager de magicien. Je me présente alors comme un spécialiste de la triche (ce qui est exact) pour la détection des tricheurs dans les casinos.
En changeant d’étiquette, de magicien à tricheur, les chaînes concurrentes sont intéressées et, une fois sur place, à chaque émission je glisse subrepticement que je suis aussi magicien et le “tour” est joué. J’ai atteint mon objectif (de passer à une émission de télévision) en prenant un autre chemin. Il s’agit d’un exemple ou le fait d’avoir plusieurs cordes à son arc constitue un atout.
Un échec ou bide peut être considéré comme un feed-back.
On peut utiliser un échec pour modifier l’état d’une situation et améliorer sa magie. ROUSSEAU a écrit : “Les ténèbres de l’ignorance valent mieux que la fausse lumière de l’erreur”. Mais, je ne partage pas cette opinion, car l’erreur est un facteur essentiel de l’apprentissage.
“Si vous fermez la porte à toutes les erreurs, la vérité restera dehors”, disait R. TAGORE. L’erreur est un feed-back et le feed-back est ce qui permet de s’ajuster par des corrections qui sont les jalons mêmes de l’apprentissage. Mais attention, il ne faut pas confondre erreur et bêtise. La bêtise ne sait pas profiter de ses erreurs. Par exemple, si je fais un spectacle de magie comique et que le public ne rit pas, il s’agit d’un échec ; mais j’ai pu commettre cette erreur par manque d’information.
Par contre, si ceux qui m’engageaient m’avaient précisé que le public en question aimait l’humour raffiné et que j’ai fait de l’humour trivial, c’est de la bêtise ; dans ce cas, je doute fort que l’on puisse en tirer quelque profit.
Observer et recueillir de l’information
Selon moi, une magie efficace repose d’abord sur l’observation. En effet, observer, c’est être attentif, décoder. Il est important de savoir recueillir l’information sur la réaction du public afin de pouvoir, selon le cas, continuer ou adapter les tours. Regarder un tour de magie fait par un ami, observer les techniques utilisées, l’impact magique, essayer de comprendre comment le tour a été créé, voilà d’excellentes sources d’information.
Il est aussi important de noter les commentaires après le spectacle, les critiques des magiciens, les applaudissements, rires, ovations, réactions sur les tours loupés, etc., et de poser des questions précises sur un tour, tout en tenant compte de la subjectivité de la personne qui répond.
Exemple : On posera la question de la façon suivante : “Dans le tour du foulard, qu’avez-vous le plus apprécié : le changement de couleur, le voyage, la disparition ?”, et non “Avez-vous aimé le tour du foulard ?” qui amenant une réponse simple (oui ou non) apporte peu d’information.
Développer son modèle de magie
Présenter un spectacle, en éprouver toutes les émotions et sensations, demeurent une expérience individuelle et permet de créer son propre modèle de magie.
En ce qui me concerne, je privilégie le close-up et le Stand-up. J’aime voyager sans bagage, m’adapter rapidement à n’importe quelle situation ; faire des “miracles” avec un tour de cartes, voici un modèle de magie qui me convient. Ceci ne signifie pas que je ne m’intéresse pas à d’autres modèles, mais j’ai opté pour certains aspects qui me correspondent.
Quel que soit le modèle vers lequel on s’oriente, il est important de s’assurer que la présentation rejoint les divers types de spectateurs : ceux qui ont besoin de voir (visuels), ceux qui aiment entendre une histoire (auditifs), ceux qui privilégient le toucher (kinesthésiques), tout en considérant aussi que chaque individu porte en lui ces trois composantes à des degrés divers. Il peut être souhaitable d’intégrer ces trois catégories dans un spectacle de magie et même dans un tour afin de rejoindre le plus de spectateurs possibles.
Ainsi, dans la mesure du possible, les tours pourront-ils raconter une histoire, contenir des fioritures et permettre au spectateur de toucher les objets magiques. Cependant, présenter de la magie uniquement visuelle, parlée ou tactile demeure une alternative souvent acceptable.
Ainsi, maîtriser le spectacle, entrer en relation avec le public, observer, recueillir de l’information, tout doit tendre vers une harmonisation entre le magicien et son public. C’est un peu comme deux danseurs. En synchronisant leurs pas, par l’observation et l’ajustement, ils parviennent à l’harmonie sans savoir qui conduit et qui est guidé.
Ainsi, pour moi, l’objectif ultime de la magie est-il d’atteindre l’harmonie avec le public et de vivre un moment d’échange, de complicité et de joie dans ce partage.
Extrait de ses notes de conférences publiées en 1995.
Merci à Bruno SANVOISIN pour la relecture.
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