II – Le trac et ses multiples formes
J’ai l’intime conviction que nous ne vivons pas une seule forme de trac. Celui-ci varie d’intensité non seulement selon les conditions de travail dans lesquelles nous jouons mais aussi en fonction du public devant lequel nous nous trouvons.
Permettez-moi de revenir sur mon cas personnel. Je suis capable de présenter de la magie de proximité en face de n’importe quel groupe social, dans n’importe quel endroit sans pour cela souffrir d’un trac “handicapant”.
Maintenant, placez-moi en face de magiciens que j’admire, dans un lieu comme l’Escorial par exemple et écoutez les battements de mon coeur. Vous vous rendrez très vite compte que le trac est bel et bien présent et que je dois faire un énorme effort sur moi-même pour le dominer.
Tout est donc dans l’esprit, n’est-ce pas ?
Le trac selon mon expérience prend naissance dans notre esprit en fonction de deux données (j’exclue bien sûr de ma réflexion le manque de préparation) :
– La première étant, non pas la peur de l’erreur – puisque en bon professionnel que nous sommes, nous avons pensé à toutes “les sorties de secours” que l’on pourrait utiliser lors d’une situation conflictuelle – mais la peur que nos spectateurs se rendent compte de quelque chose qu’ils ne sont pas supposés voir (je sais, je me répète mais il faut de temps à autre souligner les choses importantes !).
Toute notre technique artistique est basée sur le secret et celui -ci doit être gardé coûte que coûte. Cette limitation peut donc créer une peur plus ou moins grande selon notre personnalité et selon nos expériences plus ou moins négatives de notre passé artistique.
– La deuxième donnée est le fait que l’on se sait jugé, critiqué, par notre public (*). Cette deuxième donnée englobe donc l’image mentale que nous nous faisons de nous-même et de notre public, image qui est souvent éloignée de la réalité.
Ce qui est à la fois passionnant et terrible dans la magie c’est que notre Art n’est pas une affaire personnelle, c’est une collaboration entre nous et nos spectateurs. L’acteur Rae Allen disait : “Vous communiquez avec, pas à un public !” Le but étant de créer une symbiose entre ces deux parties.
D’un côté, c’est un aspect merveilleux de notre métier mais de l’autre côté cela peut être terrifiant dans le cas où la communication ne se passe pas comme nous le voudrions.
Dans ce cas extrême, on risque de s’éloigner de nos spectateurs et de passer à côté de la communion que l’on voulait créer avec eux. Et sans communion pas de symbiose, avec un résultat très clair : un spectacle raté.
(*) D’ailleurs, dans notre esprit, qui est ce public ? Est-ce ce à quoi il ressemble : un groupe de personnes ? Ou est-ce une “entité” que nous nous inventons et que nous plaçons là pour nous regarder ? “Ce troisième moi” comme le surnommait le grand acteur Italien Salvini, une partie de nous-même qui n’est ni nous-même ni le magicien que nous représentons.
Ces deux données font parties intégrantes de notre hérédité artistique. Ainsi l’histoire nous dévoile que l’artiste a toujours eu peur d’être vu par ses spectateurs.
Si nous remontons le temps jusqu’à l’époque de la Grèce Antique, on constate que les acteurs portaient un masque dans l’unique but de se protéger du regard (diabolique) des spectateurs – une manière efficace pour eux d’amoindrir leur trac en se cachant derrière un faux visage et d’éviter de se retrouver “nu” sur scène.
Il est vrai que s’exposer seul devant des centaines d’inconnus est une chose qui demande soit beaucoup de courage, soit une grande dose d’inconscience. A vous de choisir !
Les deux peurs dont nous avons parlé précédemment, additionnées l’une à l’autre peuvent donc engendrer un stress plus ou moins grand. Qui en douterait ?
Rassurez-vous, dans quelques instants vous découvrirez les techniques que j’utilise pour atténuer ce mal de la scène que provoque de temps à autre la voie artistique que nous avons choisie comme chemin de vie.
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