“Je ne voudrais pas que mon pire ennemi souffre de ces terribles moments.”
Luciano Pavarotti
Qui n’a pas connu le trac à un moment donné dans sa vie d’artiste ?
Ce phénomène terrible qui noue le corps et nous freine l’esprit avant, et parfois pendant, une représentation.
Ce sentiment d’angoisse au moment de monter sur scène, qui nous enveloppe, nous paralyse et nous fait perdre une grande partie de nos moyens.
Cette appréhension inquiétante face au public qui provoque des tremblements, des palpitations, une bouche sèche, des mains moites, j’en passe et des meilleures.
Avez-vous déjà vécu cela ?
Vous êtes vous reconnu dans la brève description des différents symptômes que fait naître le trac?
Oui ?
Tant mieux ! Car j’ai en ma possession quelques outils qui, je le sais, vont vous permettre d’alléger votre vie artistique et mieux vous faire savourer vos aventures scéniques.
I – La théorie du trac
Il y a une théorie qui circule dans le monde artistique et dans notre monde magique en particulier qui dit que le trac apparaît lorsque l’artiste ne s’est pas suffisamment préparé à la situation dans laquelle il va se trouver.
Je vais d’emblée contredire cet adage en vous parlant de mon expérience et de celle d’un des plus grands théoriciens et praticiens que la magie de proximité ait connus : notre maître Arturo de Ascanio – attention n’y voyez aucune comparaison, juste deux histoires qui s’additionnent l’une à l’autre.
Débutons d’emblée par mon expérience personnelle.
J’ai très vite – sans grande créativité ni maturité artistique – présenté des concours en Belgique que j’ai eu la chance et le bonheur de remporter. Je m’étais, bien sûr, préparé pour affronter ces terribles conditions de travail mais, à dire vrai, dans l’insouciance de ma jeunesse artistique, le trac était presque inexistant.
A cette époque (lointaine…hé oui !), je pouvais me retrouver en face des plus grands maîtres de notre Art, je n’avais aucune palpitation, aucune boule dans l’estomac ou dans la gorge, aucune accélération cardiaque, rien !
Juste le plaisir de pouvoir partager ma manière de créer des illusions avec les autres. Ce ne sont que quelques années plus tard avec une maturité artistique un peu plus grande que le trac est rentré dans ma vie par une petite porte, pour ensuite s’inviter fréquemment.
Paradoxalement, à ce moment-là de ma carrière, j’étais beaucoup mieux préparé que dans le passé et pourtant le trac était beaucoup plus présent. Drôle de paradoxe, n’est-ce pas ? !
Ce premier exemple va, me semble-t-il, à l’encontre de la théorie précitée qui dit – je vous le rappelle – que si l’on est bien préparé, le trac n’existe pas.
J’en profite pour ouvrir une petite parenthèse et citer Kaplan (l’acteur, pas le magicien) qui dit qu’une personne qui, à une étape de sa carrière, voit son trac miraculeusement disparaître, ne tardera pas à quitter la scène.
Je vous rapporte également cette anecdote concernant la grande actrice Sarah Bernardt qui répondit à une jeune comédienne se flattant de ne pas connaître le trac : « Mais cela vous viendra avec le talent ! ».
Nous pouvons donc déduire selon ces deux grands artistes que l’absence totale de trac signifie que, soit l’acteur possède un talent médiocre ou en tout cas très limité, soit qu’il n’en possède pas du tout. C’est plutôt rassurant pour ceux qui ont fait du trac un fidèle compagnon, non ?
Le deuxième exemple est celui d’Arturo de Ascanio. Ceux qui l’ont vu travailler en spectacle ou durant les conférences qu’il donnait lors de congrès de magie se sont très vite aperçus que, de temps à autre, le trac se saisissait de lui.
Cela voulait-il dire qu’il ne s’était pas suffisamment préparé ? Non, bien sûr ! Arturo avait une sensibilité à fleur de peau qui le rendait, dans certaines conditions, intimidé par son public ; et c’est cette particularité mentale qui le mettait mal à l’aise. Pour ce qui est de son extraordinaire technique, je ne vous apprends rien en disant qu’il la dominait à la perfection.
Par ces deux exemples, je peux affirmer fermement que la cause du trac n’est pas exclusivement due à une mauvaise préparation – ce qui peut bien sûr être le cas – mais surtout à une mauvaise image mentale de soi.
Puisque je vous imagine, amis lecteurs, être de vrais passionnés travaillant votre technique nuit et jour, je ne vais parler que de cette deuxième option : l’imagerie mentale. Pourquoi nous déstabilise-t-elle autant ?
La réponse est simple : nous avons tellement envie de bien faire les choses que nous engendrons la peur de ne pas y parvenir. Cette peur consciente n’est pas due aux erreurs que l’on pourrait faire mais au fait que le public puisse voir quelque chose qu’il n’est pas supposé voir.
C’est elle qui nous empêche de nous exprimer en toute liberté et d’utiliser toutes nos capacités physiques et mentales.
Poursuivant ma réflexion, je citerai le mentaliste Tony «Doc» Shiels qui nous dit que le trac touche pratiquement tous les « pros » et beaucoup moins les amateurs.
Il explique cela par le fait que le « pro » a effectivement des raisons d’être nerveux étant donné que c’est son gagne-pain qui est en jeu ; si le public ne l’aime pas, il a de quoi s’inquiéter pour son futur.
L’amateur, quant à lui, ne connaît pas cette angoisse; le public attend beaucoup moins de lui et il s’ensuit que la tension à laquelle il est soumis est beaucoup moins grande.
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